Chronique d’album : Ben & Ellen Harper – Childhood Home

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On n’attache pas assez d’importance aux noms. Un nom, c’est une marque, un réceptacle, un tout, tant qu’on peut très bien l’avaler façon méthode globale, sans y réfléchir, et ne pas le reconnaître sous une forme un peu différente. Un nom et un prénom surtout. Mister Ellis était mon prof d’histoire américaine au Lycée de Lilburn et pas un seul instant je n’avais pensé à Breston-Ellis. Ma prof de math s’appelait Madame Delon et une quelconque parenté avec Alain-Delon ne me serait jamais venue à l’esprit. Dans le même esprit, il fallut de longues fractions de seconde avant que d’extraire l’auteur principal du « Ben & Ellen Harper » glissé dans ma boite aux lettres.

Après une douzaine d’albums studios (et un Grammy award encore l’an passé), Ben Harper débarque donc avec un disque tout neuf écrit en collaboration avec sa mère, Ellen. Sur une quarantaine de minutes et dix chansons très personnelles, mère et fils mêlent leurs voix pour narrer en musique leur vie de famille passée, avec ses bons et ses mauvais moments. Les séparations côtoient la chaleur du foyer, les reproches n’empêchent pas l’amour et finalement, que l’on s’appelle Harper ou Martin, rien ne ressemble mieux à une vie de famille qu’une autre vie de famille.

Les Harper cependant, ont ce petit truc en plus que n’ont pas toutes les autres familles : chez eux, la passion de la musique se transmet de génération en génération. A l’aube des années soixante, les grands-parents Harper ouvraient le Folk Music Center and Museum à Claremont (Californie) avant que leur fille Ellen ne reprenne la suite pour en faire une sorte de laboratoire créatif et philosophique. Multi-instrumentiste, jouant elle-même dans des groupes, elle tenait la boutique alors que le père de Ben les avait quittés. Il allait l’y rejoindre après les cours, baignant dans cette atmosphère artistique au milieu des banjos et autres instruments du monde entier, côtoyant des artistes tels David Lindley ou Taj Mahal. « Si je n’avais pas reçu cette éducation, je ne pense pas que je ferais ce que je fais actuellement » déclara Ben Harper lors du décès de son grand-père en 2004.

Pas forcément ordinaire, c’est cette enfance et ce foyer que cet album évoque. Comme si de tout ce tourbillon il ne ressortait au final qu’une forte impression de calme, de quiétude. La pochette est raccord avec une maison sous un ciel sans nuages, posée sur cette neige qui feutrerait le moindre bruit inopportun : l’archétype du « home sweet home » ; avec sa bande son donc, toute en acoustique et harmonies vocales, en plein dans l’Americana quoi qu’il s’en défende, la qualifiant plutôt de musique tout « à la fois soul, californienne, folk rock et américaine ».

Un disque qui s’écoute sans un tube ni même de mélodie véritablement accrocheuse mais tout simplement pour ce qu’il dégage : une sensation de tranquillité et d’apaisement. « J’ai toujours pensé au foyer comme ce que vous commenciez par fuir, puis comme ce que vous cherchiez éperdument à regagner » dit Ben Harper.

La sérénité et le bien-être d’un foyer où chaque chose semble à sa place, sans enjeu ; voilà très exactement ce que Ben et Ellen Harper ont retranscrit avec leur Childhood Home.

Article publié sur Discordance.fr

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