CLASSROOM Y2 V4,5 : CHAPITRE 5


Chasse au trésor en eaux troubles

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Traduction : Nova /Raitei (5-9)
Correction : Raitei/Nova (5-9)
Relecture : Ayanokôji is the best
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Il ne restait que trois jours sur le bateau de croisière.

C’est bien connu, le temps passe toujours beaucoup trop vite quand on s’amuse !

Tôt le matin, alors que tout le monde commençait à regretter les jours passés, tous les élèves reçurent un message.

Hondô, qui fut le premier à ouvrir son téléphone, le lut à haute voix

Hondô — « Aujourd’hui, nous allons organiser une jeu de chasse au trésor à 10h….». Qu’est-ce que ça peut bien être ?

Tout le monde se mit alors à lire le mail contenant le mot « jeu », mot ne laissant personne indifférent.

Miyamoto — Un jeu, hein ?

Jeu bonus. Participation libre.

Conditions : Ouvert sans condition de sexe. 10 000 points privés sont requis pour participer.

Date : Aujourd’hui, 8 août à 10h00.

Pour plus d’informations, veuillez-vous rendre au 5ème étage. Cette prise d’information ne vous engage à rien, vous pouvez tout à fait choisir de ne pas participer.

Pendant un moment, je pensais à  un examen spécial, mais ce n’était pas possible. Après tout, la participation était libre, ce qui semblait plutôt intéressant. La seule pénalité était finalement 10 000 points.

Les détails n’étaient pas connus à ce stade, mais étant donné qu’il s’agissait d’une « chasse au trésor », on pouvait supposer qu’il y allait avoir une récompense à la clé comme des points privés par exemple.

10 000 point comme coût de participation ne me semblait vraiment pas excessif. Et puisque j’étais toujours à court d’argent, j’étais tout à fait prêt à participer pour avoir un petit revenu bonus.

Miyamoto et Hondô semblaient intéressés. Ils commencèrent à émettre l’idée de participer ensemble à la fin du repas.  Je pensais inviter Akito à se joindre à nous mais…

Miyake — Ne vous inquiétez pas pour moi, allez-y !

Dans le lit, Akito expira lentement. Il était légèrement fébrile. Peut-être avait-il attrapé froid la veille, à la piscine. 

Miyamoto — Si on avait pu ramener des affaires sur ce bateau, je t’aurais bien prêté ma console ! 

Miyake — J’aurais vraiment pas eu la tête de toute façon…

Avec des paupières tombantes, Akito se blottit dans son oreiller.

Ainsi nous finîmes notre petit déjeuner aux alentours de 9h50, en compagnie d’Akito alité. Ensuite nous nous rendîmes sans lui, légèrement à contrecœur, au lieu de rendez-vous indiqué dans le message.

1

Un grand nombre d’élèves étaient rassemblé dans la salle prévue à cet effet. Je m’étais demandé combien de personnes allaient participer, et là je pouvais voir qu’il y avait environ la moitié de tous les élèves de l’école. Je m’attendais à plus, mais je suppose que les autres avaient préféré profiter de la piscine moins bondée. C’était le principe de la participation libre, après tout.

Peu après l’échéance, de l’animation se fit ressentir sur la scène.  Il semblait cela allait être Takato-sensei, le professeur de la TLe A, qui allait nous expliquer les règles. Presque tous les enseignants étaient réunis, mais je ne vis pas Tsukishiro ou Shiba-sensei, le professeur principal de la 2nde D. Si ce dernier avait été engagé par cet homme, je n’aurais pas été surpris qu’il ait démissionné après cet incident. En fait, Mashima-sensei et Chabashira étaient tombés à pic. 

M. Takato — Bonjour à tous.

Un autre professeur ferma lentement la porte.

M. Takato — Il est déjà 10h, et nous nous en tiendrons aux élèves ici présents pour les inscriptions.  

Même s’il s’agissait d’un jeu sans obligation, les règles habituelles relatives à la ponctualité s’appliquaient.

M. Takato — Avant de commencer, je voudrais vous expliquer comment nous avons imaginé ce jeu de chasse au trésor. Il a été proposé par le président du Conseil des élèves. Nagumo-kun a en effet suggéré la mise en place d’une activité récréative intéressante et agréable axée sur les liens d’amitié après avoir été en compétition les uns avec les autres. Nagumo, je t’invite à venir saluer l’assemblée.

Takato-sensei l’appela et, sans plus attendre, Nagumo se tint devant les participants.

Nagumo — J’ai le plaisir d’annoncer que c’est la première fois qu’un jeu bonus de ce genre est organisé avec la pleine coopération de l’école. Cette idée nous est venue lors de nos nombreuses réunions, et l’objectif était d’enrichir cette vie scolaire.  Sur l’île déserte, toutes les classes se sont affrontées de manière impitoyable. Mais dans cette chasse au trésor, il sera possible de nouer des partenariats au-delà des classes. Je vous invite vraiment à saisir cette occasion !

C’était sur son discours mielleux de président du Conseil qu’il concluait. Cela contrastait avec son comportement de la veille, qui avait mené Ichinose aux larmes. D’ailleurs, cette dernière, en tant que membre, était assise auprès des professeurs pour écouter. En apparence elle semblait comme d’habitude, mais il était évident qu’elle avait pris un sacré coup et que les histoires de cœur mettent du temps à guérir. Une fois que ce sera le cas, son amour pour moi s’éteindra, voire se transformera en haine. J’étais assez curieux de savoir comment ça allait évoluer. En tout cas, elle vivait certainement un tournant majeur. Après le discours de Nagumo, le micro revint à Takato-sensei.

M. Takato — Les membres du Conseil ne pourront pas participer à cette chasse au trésor puisqu’ils en seront les principaux modérateurs.

Certains membres du Conseil, comme Horikita et Ichinose, avaient été convoqués pour rencontrer Nagumo.

M. Takato — Maintenant, laissez-moi vous donner un aperçu du jeu de chasse au trésor. Les règles sont très simples

Takato-sensei leva sa main droite, tenant un morceau de papier carré entre le pouce et l’index. Le périmètre du carré était d’environ 5cm, et un QR code était imprimé dessus.

M.Takato — Au total, 100 autocollants portant un QR code de ce genre ont été collés sur tout le bateau. Les participants trouveront ces autocollants en participant au jeu. En scannant les autocollants à l’aide d’une application spéciale, les participants seront récompensés par des points privés. Toutefois, seul un scan est permis par téléphone. Veuillez noter que le résultat sera pris en compte immédiatement lorsque vous accéderez au site et que la récompense sera versée.

Bien entendu, si vous lisez le QR code avec un autre téléphone portable, il ne sera pas valide et vous ne recevrez pas de récompense. En outre, toute personne qui retire l’autocollant sans autorisation ou qui utilise un stylo pour rendre les QR codes illisibles encourront des sanctions, et ce quand bien même cette personne ne participerait pas.

Eh bien, c’était en effet très simple. Et il s’agissait plutôt d’une question de chance finalement.

M. Takato — Le montant en points privés le plus bas que vous pouvez obtenir est de 5 000, ce qui représente 50 QR codes parmi les 100 qui seront sur le bateau. Ensuite, il y a 30 QR codes qui peuvent vous rapporter 10 000 points.

Encore fallait-il les trouver avant les autres.

M. Takato — Les 20 QR codes restants se répartissent comme suit : dix valent 50 000 points, cinq ont une valeur de 100 000 points, trois donneront 300 000 points… Et les deux derniers 1 million de points ! Bien évidemment, plus un code était difficile à trouver, plus il était susceptible de rapporter des points privés.

Avec environ 200 participants, cela signifiait qu’une personne sur deux allait se retrouver bredouille. Néanmoins, trouver le QR avec la plus grosse valeur pouvait conférer un million de points, ce qui représentait une sacrée somme que même un examen spécial ne conférait pas. 

Ici néanmoins, il n’y avait pas besoin de beaucoup lire pour savoir que le gain allait être négatif pour la plupart des participants.

M. Takato — Il n’y a que 100 QR codes pour plus de 200 élèves. Mais nous avons mis en place un système où les participants peuvent se mettre en binôme, quelle que soit leur année. Si l’un d’entre eux utilise son téléphone portable pour lire un QR code de 30 000 points, par exemple, les deux élèves gagneraient 30 000 points.

100 binômes pouvaient générer des récompenses pour 200 personnes, ce qui réduisait grandement le risque de participer pour rien.

Le seul inconvénient d’être en équipe était de ne pas se mettre d’accord sur le code à scanner, mais en dehors de ça, c’était tout bénef.

M. Takato — J’ai certes dit que les QR codes avaient été placés sur tout le bateau, mais il est bien évident que certaines zones sont exclues du champ de recherche.

Takato-sensei illustrait ses propos à l’aide de l’écran. Pour résumer, les QR codes ne pouvaient bien entendu pas se trouver dans les toilettes ou dans les chambres. De même que les endroits réservés au staff n’allaient pas être concernés. En bref, les QR codes ne se trouvaient que dans les parties communes et accessibles aux élèves.

M. Takato — Sur ce, nous allons vous distribuer un document.

Les professeurs commencèrent alors à nous distribuer un papier. Peu après, je reçus un morceau de papier plié en deux. Dessus figurait la carte du bateau légèrement modifiée, les zones dans lesquels les QR codes se trouvent ayant été colorées.  Figuraient également sur le papier d’obscures phrases et suites de chiffres.

M. Takato — Fondamentalement, ce jeu est surtout une question de chance. Toutefois, nous avons intégré certains éléments qui demandent de l’habileté.

Peut-être ces écritures sur la carte que j’avais évoquées en faisaient partie.

M. Takato — Il y a trois énigmes écrites ici. Si vous les résolvez, vous pourrez trouver les cachettes de trois QR codes. Considérez que ces QR codes seront introuvables si vous ne trouvez pas la réponse à ces énigmes.

Trois QR codes spécialement mis en énigme sur un total de cent ? Je lus les trois énigmes en diagonale, puis je mis le papier dans ma poche.

M. Takato — Les inscriptions seront ouvertes pendant 30 minutes à partir de maintenant. Veuillez déclarer votre participation à partir de vos téléphones portables. Si quelqu’un est dans l’incapacité d’allumer son téléphone en raison d’un manque de batterie ou autre, veuillez contacter un professeur.

Les uns après les autres, les élèves sortirent leur portable et commencèrent à s’inscrire. Une minorité avait quitté la salle, donc on pouvait supposer que tous les gens restants allaient être de la partie ! Le jeu prenait fin à 17h00. Le QR code devait donc être lu avant.

Comme la plupart des gens, je saisis mon téléphone portable pour débuter la procédure. Mais avec autant de personnes, inutile de dire que je me sentais plus épié que jamais.  Néanmoins, ils me sentaient certainement sur mes gardes puisque les regards se mirent à diminuer progressivement. Je ne savais pas s’ils avaient tous reçu des instructions, mais ils ne voulaient pas encore me faire savoir qu’ils me surveillaient. Ils gardaient ça pour plus tard, dans une situation plus embarrassante pour moi. Tant que je ne connaissais pas leur objectif, j’étais obligé de rester sur mes gardes. Il était important de penser que les murs avaient des oreilles et d’agir en conséquence.

Parmi les participants, il y avait aussi Kei, ma petite amie, mais nous ne nous étions même pas regardés. Après tout, nous n’avions même pas officialisé notre relation, alors nous évitions de nous dévorer du regard. Se mettre en binôme ? Il ne fallait même pas y penser au risque de paraître bizarre. C’est pendant que j’étais dans mes pensées que Horikita apparut devant les élèves avec un micro.

Horikita — Je suis Horikita, du Conseil des élèves. J’ai une demande pour tous les futurs participants. Pour éviter les fraudes, vous devrez non seulement payer les 10 000 points à la sortie de la salle mais, en même temps, inscrire votre nom sur la liste subdivisée par année. Veuillez comprendre qu’il s’agit d’une mesure visant à empêcher toute participation frauduleuse par l’utilisation du téléphone portable d’un tiers. Après avoir reçu votre récompense, veuillez revenir ici pour le signaler avant la fin de l’épreuve. Le cas échéant, votre récompense ne vous sera pas versée.

Dans le cas d’un simple versement de points par téléphone, on pouvait tout à fait utiliser le portable de quelqu’un d’autre. Je ne savais pas dans quelle mesure cela constituait un problème en soi, mais cela s’éloignait certainement du but initial du jeu.

Ainsi, en obligeant le joueur à remplir un formulaire pour confirmer son identité au moment du paiement, il était possible de vérifier la traçabilité. Autrement dit, je ne pouvais pas utiliser un autre portable que le mien et, quand bien même le vrai propriétaire se pointait, il n’allait pouvoir bénéficier d’aucun paiement puisque son nom ne figurait pas sur la liste.

Quid de ceux qui auraient fait la procédure en arrivant à passer entre les mailles du filet, sans payer ? Le Conseil des élèves et les enseignants travaillaient ensemble en installant une longue table spéciale à la sortie. Ils faisaient procéder les élèves au paiement des frais d’inscription à partir de leur téléphone tout en leur faisant écrire leur nom avant de quitter la salle. Tout était assez bien organisé.

Au milieu de tout ça, je faisais également la queue avant d’arriver nez à nez face à Horikita, qui était à la réception.

Horikita — Écris ton nom ici. Ensuite, nous encaisserons tes 10 000 points.

Elle dit cela d’une manière sèche. Ni une ni deux, je fis ce qu’elle dit et payai les points dus en insérant mon téléphone dans le terminal de paiement. J’étais officiellement participant !

Horikita — Suivant.

N’ayant rien à dire de particulier à Horikita, je suivis le mouvement et décidai de quitter la pièce.

2

Ainsi, le jeu de chasse au trésor avait commencé et allait durer jusqu’au soir. Il y avait quelques règles à suivre, mais en fait elles étaient surtout relatives à des sanctions. En bref, le vrai ingrédient pour cet évènement allait être la chance.

La zone autour du point de départ était très fréquentée puisqu’elle se trouvait être une potentielle zone de QR code. La masse de gens cherchait tels des sauterelles dévorant les cultures. Il n’y avait pas de place pour moi dans cette foule, et d’autres se disaient la même chose que moi en décidant d’aller fouiller ailleurs.  Le téléphone était vraiment très pratique pour rester en contact, d’autant que pas mal de gens cherchaient sûrement un partenaire en même temps qu’ils débutaient la chasse au trésor.

Au passage, il était non seulement possible de former un duo par téléphone mais également de se séparer.

Karuizawa — Hé, Mori-san, pourquoi on va pas voir en haut ?

Kei, qui avait un peu trainé, marchait amicalement avec Nene Mori, une fille de notre classe. Apparemment, Kei s’était déjà concertée avec d’autres personnes pour former un groupe. Étant seul, j’avais plutôt décidé d’aller voir en bas, histoire de ne pas nécessairement être collé à elle.

Enfin, tout de même, ça aurait pu être agréable de faire équipe avec quelqu’un. Mais ce n’était pas comme si j’avais 40 possibilités. Déjà j’avais parlé à relativement peu de gens ces derniers temps. Keisei, du groupe Ayanokôji, aurait pu faire l’affaire mais avait tout de suite déclaré ne pas vouloir participer. Akito était malade.  Quant à Haruka et Airi, elles s’étaient mises ensemble de suite.

— Ah…

Alors que je commençais à bouger, je tombai sur Satô. Je levai légèrement la main en guise de salut et tentai de partir, mais…

Satô — Oh, attends une seconde !

Elle m’attrapa par le bras et m’arrêta précipitamment.

Satô — A… Ayanokôji-kun, tu as déjà un partenaire ?

Moi — Non, je suis tout seul.

Je n’avais pas dit « pour le moment » parce que je n’avais pas l’intention de me mettre avec quelqu’un. Ça aurait été une paire de manche si j’avais eu quelques amis ou au moins une personne avec qui naturellement me mettre. Je me sentais presque seul !

Satô — Alors, on pourrait se mettre ensemble ?

Elle me fit proposition si inattendue que ça me laissa légèrement sans voix. Pour rappel, Satô avait été la première personne à m’avouer son amour l’année dernière. Ce n’était hélas pas réciproque et, après ça, j’avais commencé à sortir avec Kei. Je ne m’attendais pas à ce qu’elle me propose de faire équipe avec elle après avoir reçu un râteau de ma part.

Je n’avais aucune raison particulière de refuser, mais pour être honnête, je n’avais aucune raison d’accepter non plus. Kei s’était certes déjà associée à quelqu’un d’autre donc ce n’était pas un problème de faire équipe avec quelqu’un, mais de là à se mettre avec Satô…

Satô — Tu penses à Kei… ?

Il était difficile de répondre à cette question, mais Satô semblait l’avoir deviné immédiatement à mon attitude.

Satô — J’ai entendu dire que vous avez l’intention d’officialiser bientôt.

Moi — En effet.

Il semblait donc que Kei ait pris l’initiative de nous exposer en cette seconde partie d’année. D’après ce que Matsushita avait dit, je savais que Satô était au courant de notre relation.

Moi — Ça fait un moment qu’on sort ensemble, ce n’est pas comme si nous pouvions garder ça secret pour toujours.

Satô — Eh bien, certains couples se cachent. D’autant que, vous deux, ça semblerait tellement délirant aux yeux des gens… Vos chances de vous faire griller sont proches de zéro.

Satô avait dit à certaines personnes proches d’elle qu’elle soupçonnait une relation entre Kei et moi. Bien sûr, je ne l’avais pas entendue en parler directement, mais j’en étais sûr à cause de la façon dont Matsushita avait parlé plus tôt. Et je ne pense pas que Satô l’ait fait avec de mauvaises intentions, elle avait juste dû spontanément faire part de ses observations.

Satô — Enfin, à la base c’était vraiment pour former un binôme pour l’évènement. Sans arrière-pensée… D’accord ?

Elle précisait bien qu’elle n’avait pas de motifs cachés. 

Moi — Combien de points privés tu as, là ?

Satô — Eh bien, c’est un peu embarrassant, mais… environ 180 000 points.

Non pas que je fus en mesure de juger la situation économique des autres, mais en considérant que des points privés nous avaient récemment été transférés, on pouvait considérer que c’était bien peu. Et dans cette situation, 10 000 points étaient tout de même une somme précieuse malgré tout. Elle devait vraiment être motivée. Ainsi, elle voulait certainement trouver un QR code rare en s’associant à moi.

Moi — On peut faire équipe, si tu veux. Je te promets rien, par contre…

Satô — Vraiment ? Super !

L’attitude de Satô, si heureuse de faire équipe avec moi, m’avait fait me sentir bien, je l’avoue. Ainsi nous sortions nos téléphones portables et commencions la procédure via l’application. Nous étions maintenant officiellement en binôme et pouvions empocher une récompense si l’un de nos téléphones scannait un QR code. Je pouvais m’estimer satisfait si on tombait sur un QR code d’au moins 30 000 points.

Satô — Au fait, t’en penses quoi du truc bizarre que les profs ont distribué ?

Satô sortit le papier froissé de sa poche.

Satô — Ah ?

En regardant l’état du papier qu’elle avait essayé de sortir, elle le remit de sitôt dans sa poche, visiblement embarrassée.

Satô — Oh, hé, c’est un peu… Je n’arrive pas à comprendre même en regardant de près… Haha. Ayanokôji-kun, tu en as un aussi, non ?

Je ne pensais pas que l’énigme pouvait effectivement être résolue, alors je l’avais juste rangé dans ma poche. Je sortis le papier plié en quatre et le dépliai devant Satô.

Satô — Ces phrases correspondent à trois endroits où se trouvent des QR codes, pas vrai ?

Moi — Oui.

Satô — Donc, si on les résout, il est possible d’obtenir 1 million de points ?

Moi — Non, je ne crois pas.

Je jouais un peu le rabat-joie, mais j’allais développer.

Satô — Ah ouais ?

Seuls 3 QR code sur 100 sont à scanner après avoir trouvé ces énigmes. J’aurais aimé m’en tenir à ça pour empocher le gros lot, mais…

Moi — Il y a trois énigmes de difficulté à peu près équivalente. Mais tu ne sais pas quel est le montant associé à ces QR codes. Cela pourrait être 100 000 points comme 50 000.

Satô — Mais ils n’avaient pas parlé de 3 QR codes à 300 000 ? C’est peut-être ça…

Moi — Il est tentant de faire ce rapprochement mais on ne peut pas en être sûrs.

Vraisemblablement, ils n’auraient pas donné de localisation pour les récompenses les plus élevées.

Satô — Hein ? Même si j’arrive à résoudre une énigme aussi complexe, je n’aurais aucune garantie sur le montant ?

Moi — Cette chasse au trésor est un jeu bonus qui a l’air de reposer quasi entièrement sur la chance. Tu l’as remarqué non ?

Si les QR codes les plus élevés dépendaient de cette énigme, le principe de « chasse au trésor » aurait perdu toute sa saveur. Il ne fallait pas partir du fait que le document soit forcément lié aux meilleurs codes.

Satô — Oh, c’est vrai que ça n’aurait pas été drôle si le seul moyen de mettre la main sur le jackpot était de résoudre le problème…

Elle était elle-même parvenue à une conclusion logique.

Moi — Cela peut être tout aussi divertissant de trouver des QR codes en résolvant les énigmes, mais on ne peut pas être sûrs de combien de points privés il y aura derrière.

Ce jeu de chasse au trésor durait des heures, mais tout allait probablement se jouer dans les premières.

Satô — Donc je suppose qu’on va pas trop s’attarder là-dessus.

Moi — Je pense quand-même me servir du doc un moment, si je ne trouve pas de QR code qui vaille le coup. En attendant, je sais où on peut se diriger.

Bien qu’entre-temps, quelqu’un allait probablement s’en être déjà servi.

Satô — Ayanokôji-kun, t’as déjà trouvé la réponse ?

Moi — D’une certaine manière.

Satô — Alors… !

Les énigmes n’avaient pas été conçues avec trop de difficulté, un peu comme des puzzles. Après tout, des élèves de chaque promo participaient, il fallait que ce soit accessible à tous. Pendant que nous en parlions, tout autour de nous, des participant à l’événement recherchaient des QR codes au hasard. Si les zones potentielles de QR code étaient limitées, dans une certaine mesure, il ne fallait pas non plus qu’ils soient trouvés trop facilement. Ce qui risquait d’être le cas quand 200 personnes se mettaient à chercher en même temps.

Un QR code valant cher allait donc vraisemblablement être caché plutôt loin de la zone de départ.

Moi — Je propose de checker les niveaux inférieurs pour le moment.

Satô — Je te suis !

Satô et moi nous rendîmes alors, ensemble, au niveau le plus bas de la zone de recherche potentielle. Une fois sur place, nous cherchâmes 5 minutes, mais n’avions trouvé que deux QR codes en évidence. L’endroit était-il mauvais ou bien c’était vraiment très bien caché ?  Le nombre d’élèves augmentait progressivement autour de moi et je n’avais toujours pas de réponse.

Satô — Hé, Ayanokôji-kun…

Moi — Que s’est-il passé ? Tu as trouvé quelque chose ?

Satô — Non. Ce n’est pas le cas. ….. Je peux aller aux toilettes une minute ? J’ai bu trop d’eau ce matin, et en fait je voulais y aller depuis tout à l’heure…

Satô me demanda ça, embarrassée.

Moi — … Puis tu es tombée sur moi, c’est ça ?

Sâto Je suis désolée, c’est vraiment trop pressant…

Ce n’était pas comme si j’allais l’en empêcher. Sur ce, je l’invitai à y aller.

Sâto Je vais faire vite !

Moi — Ne t’en fais pas.

Pendant ce temps, je continuais les recherches de mon côté.

— Ayanokôji-kun, tu participes aussi ?

 Alors que je regardais sous un siège, je fus appelé par derrière.  Je pensais à quelqu’un d’hostile, mais il se trouvait que ce n’était que Matsushita. Décidément, j’en croisais des camarades de classe aujourd’hui. Au même moment, Tatara, un terminale avec Matsushita, me fixa suspicieusement.

Tatara — … Ayanokôji, hein ?

Matsushita — Ho, vous vous connaissez ?

Naturellement, Matsushita regarda Tatara qui faisait une tête vraiment étrange. Matsushita ne pouvait pas savoir, mais il était certain qu’il avait entendu parler de moi via Nagumo.

Tatara — On est au milieu d’une chasse au trésor, alors parlons-en plus tard. Allez, on perd pas de temps !

Matsushita — Tatara-senpai, ne t’en fais pas pour moi. Fais équipe avec quelqu’un d’autre si je te ralentis !

La présence de Tatara pouvait être une bonne occasion d’explorer la stratégie de Nagumo.

Moi — Je vois que tu as l’air à fond dedans, senpai !

Lorsque je pris contact avec lui, il détourna les yeux avec une expression de mécontentement flagrante. En entendant un claquement de langue, Matsushita sentit également le changement

Matsushita — Tu me fais quoi Tatara-senpai ?

Je vis clairement une expression de fuite se dessiner sur son visage. Il appréciait Matsushita, c’était évident dès que je le vis, mais il ne faisait aucun doute que l’impératif de ne pas me parler était supérieur à son envie de faire équipe avec elle. En bref, il avait reçu des consignes.

Tatara — Matsushita, à plus tard alors !

Matsushita Oh, d’accord.

Matsushita dit au revoir à Tatara avec un léger rire. Ce dernier la regarda avec un certain regret pendant qu’il me lançait un regard furieux.

Matsushita — Ouf, sauvée… Ayanokôji-kun, quelque chose s’est passé avec Tatara-senpai ?

Moi — Rien, nous n’avons jamais parlé.

Matsushita — Hmm ?

Elle ne semblait pas convaincue, mais elle était soulagée et tapota doucement sa poitrine, comme si un poids avait été enlevé de ses épaules.

Matsushita — Hé, se peut-il que tu sois seul aussi ?

Sâto — Ahhhh, no ────

Alors que Matsushita s’apprêtait à m’inviter à la chasse au trésor, j’entendis les bruits de pas de quelqu’un qui se précipitait vers moi.

Sâto — Je suis déjà avec Ayanokôji-kun, Matsushita-san !

Satô, revenue des toilettes, s’était dépêchée de se manifester.

Matsushita — Huh ? Oh, c’est vrai ?

Matsushita regarda en arrière, surpris par l’étrange vitesse et la pression.

Sâto — J’ai vu Tatara-senpai à l’instant, vous n’étiez pas ensemble ?

Matsushita — Avec lui ? Surtout pas ! Il me collait oui.

Satô connaissait également ce Tatara. Il était en TLe A et avait des notes de B à C, sa note globale était légèrement supérieure à la moyenne dans l’OAA. Il avait également une coiffure longue et inhabituelle pour un garçon.

Matsushita — Les gars trop directs. J’essaie subtilement de les recaler.

Sâto — Oh, je vois.

Je ne comprenais pas. Enfin, pour l’instant, je devais réexaminer ce fameux dessous de siège. 

Satô —Ayanokôji-kun, il n’y a rien là, non ? Ou alors le code doit vraiment pas être terrible…

Il était certain que le dessous du siège était une cachette basique. D’ailleurs, il y avait bien un QR code à cet endroit, que je pus voir en m’accroupissant sous un angle un peu différent. Bien sûr, je n’allais pas le scanner.

Moi — Ce qui importe, c’est l’emplacement.

Satô — C’est-à-dire ?

Moi — Si tu te mets à la place des organisateurs, il faut savoir comment placer les codes proportionnellement à leur valeur.

Satô — Eh bien… ?

Satô pencha la tête d’un air incertain. Matsushita répondit sans hésiter

Matsushita — Logique, un gros QR code doit se trouver difficilement.

Moi — La question étant qui juge de la difficulté ?

Satô — Sensei !

Dit-elle avant que Matsushita ne réponde. Cependant, Matsushita compléta.

Matsushita — C’est dur de placer 100 QR codes. Les professeurs ont participé, mais on les a aidés. Surtout si tout a été fait la nuit dernière.

Moi — Est-ce qu’ils ont planifié tout ça pendant que nous étions sur l’île, ou alors tout a été décidé au dernier moment ? Si nous le savons, il sera plus facile de savoir où les autocollants ont été placés.

Matsushita — Je suis désolée, j’ai du mal à te suivre là.

Moi — Disons que les décorations et la façon dont les choses sont organisées sont pratiquement les mêmes partout sur le bateau.

Sâto — Matsushita-san, t’as capté ?

Matsushita — Eh bien, oui, en quelque sorte.

Satô — T’es incroyable, Ayanokôji-kun !

Matsushita — Ton point de vue est intéressant, mais j’ai pas trop envie de me prendre la tête. C’est une chasse au trésor tranquilou.

Moi — …Tu n’as pas tort.

Elle avait peut-être raison. Mais je préférais toujours raisonner un peu, histoire de mettre toutes les chances de mon côté.

Matsushita — Dommage. Je ne m’attendais pas à ce que tu sois pris.

Satô — Dommage ?

Matsushita — Allez, je vais me dégotter un bon partenaire. À plus tard !

Non pas que je n’appréciais pas cette petite discussion, mais le temps était précieux.

3

Moins d’une heure s’était écoulée depuis le début de la chasse au trésor. Malgré notre dispersion sur le bateau, on finissait régulièrement par recroiser les mêmes têtes. Tous en quête de la même chose.

Psychologiquement, il était difficile de lire le premier code rencontré. Après tout, impossible de connaître sa valeur avant de le scanner. Peut-être même que certains, dont moi, avaient déjà mis la main sur un QR code de 500 000 points et d’un million de points.

Nanase — Bonjour, Ayanokôji-senpai.

Moi — Hmm ? Bonjour Nanase.

Je savais qu’une présence s’approchait de moi par derrière, mais c’était Nanase. Eh bien, aujourd’hui est un autre jour, ce qui signifie que nous avons battu le record de rencontres consécutives depuis le début des vacances.

Satô — …C’est qui ?

Satô, qui pour une raison quelconque montrait une méfiance évidente, fixait Nanase. Elle, de son côté, baissa la tête sans faire attention à elle.

Nanase — Mon nom est Tsubasa Nanase et je suis en 2nde D.

Satô — Hmm… Je n’arrive pas à croire que tu ne sois qu’en seconde !

Et quand Sâto disait ça, ce n’était pas pour la complimenter.

Nanase — Ah oui ? Je ne pense pas être assez splendide pour être considérée comme beaucoup plus âgée.

Satô — Hmm ? Pourquoi tu dis ça ? Peu importe comment on te regarde, tu es superbe.

Nanase — Ces compliments me vont droit au cœur. Je tâcherai donc de m’appliquer chaque jour pour demeurer au niveau.

Satô — Je ne vois pas ce que tu peux faire de plus, honnêtement.

Nanase — C’est difficile à expliquer exactement, mais …… je pense qu’il faut également travailler son esprit.

Satô — S-son esprit ? Genre s’abstenir de boire du lait ou se faire des massages ?

Nanase — Ce genre de petites actions, éventuellement. Mais j’évoquais surtout les qualités du cœur. 

Satô — Huh, ça sonne vraiment bien dit comme ça !

Satô était impressionnée, mais je ne pense pas qu’elle avait le même niveau de réflexion pour bien comprendre. 

Moi — Tu participes aussi à la chasse au trésor ?

Nanase — Huh ? Oh, non. Pour une raison quelconque, j’avais envie de me détendre aujourd’hui.

Elle avait passé son tour… Mais alors, que faisait-elle dans le coin ?

Nanase — Je suis néanmoins heureuse de voir qu’Ayanokôji-senpai semble aller bien aujourd’hui aussi. Je vais donc prendre congé.

Peu après avoir quitté Nanase, je croisai le chemin de Nakaizumi.

Moi — Nakaizumi, hein ?

Nakaizumi — Hmm ?

J’essayai de ne pas y prêter attention ces derniers jours, mais plus j’avançais et moins je croyais aux coïncidences. Ce n’était pas un hasard si je rencontrai Nanase tous les jours. Tout d’abord, Nanase avait essayé de me contacter. Ensuite je l’ai rencontrée pendant le déjeuner le 3ème jour, mais j’ai l’impression que je l’aurais croisée d’une façon ou d’une autre. Et Nakaizumi avait l’air d’avoir un œil sur Nanase. Je ne pensais pas qu’il la suivait tout le temps non plus, mais il préparait certainement quelque chose.

C’était sûrement à cause de Ryuuen que Nanase était suivie. Voulait-il en apprendre plus sur ma relation avec elle ? Pourtant, je n’avais pas l’impression que c’était moi le centre des filatures. Si c’était elle, alors il se pouvait que Ryuuen enquête sur qui avait blessé Komiya et les autres sur l’île. Nanase pouvait avoir l’air suspecte à première vue, pourtant différents témoignages, notamment ceux de Sudou et Ike, démontraient son innocence. Alors pourquoi la faire suivre ? Outre qu’elle et moi avions vu Amasawa ce jour-là, peut-être que Nanase avait certaines informations… J’allais devoir creuser ça plus tard.

Satô — Oh, il y a quelque chose, Ayanokôji-kun ! Il était un peu difficile à trouver celui-ci !

S’exclama joyeusement Satô en pointant du doigt un code derrière l’abat-jour du stand. Il fallait le voir en effet.  Heureusement, pour l’instant, nous étions les seuls ici présents. 

Satô — Mais on ne saura pas combien de points il vaut avant de l’essayer, n’est-ce pas ?

Moi — C’est la partie la plus délicate.

Je ne pensais pas que c’était le QR code à la valeur la plus élevée. Mais à la fois c’était difficile de savoir dans la mesure où l’emplacement était à la fois évident et pas si évident que ça.

Satô — Qu’est-ce qu’on fait ?

Moi — Bon, on va faire ça.

Cependant, il s’agissait certainement d’un QR code d’une valeur plutôt correcte, il aurait été dommage de l’ignorer,

          Satô — Hé, tu vas le scanner ?

Moi — Non, pas tout à fait.

Satô — Huh ?

Je sortis mon portable et pris le QR code en photo. 

Moi —— Qu’est-ce que tu fais ?

Moi — Je vais prendre en photo tous les QR codes qui ont l’air de valoir le coup. Si on en trouve pas de meilleurs, on pourra utiliser ton téléphone pour les lire à partir de mes photos.

Satô — Ah oui, ça va marcher ?

Moi — Tant que la photo est nette, ça devrait aller.  

Revenir à chaque endroit où on pensait avoir trouvé un code aurait été une perte de temps manifeste, avec notamment le risque de se faire devancer. Mais en conservant des photos des QR codes sur son téléphone, il était possible de procéder à une lecture peu importe où on se trouvait et surtout si on était deux.  Après tout, il n’était pas possible de scanner un QR code sans se voir verser les points, à moins de le lire puis de conserver l’URL sans appuyer dessus. Et il était assez délicat de la garder sans appuyer dessus par erreur, ce qui aurait validé la lecture du code.

Moi — On nous avait dit qu’il y avait pas mal d’avantages à être deux. Mais outre le gain de points, utiliser deux téléphones portables avait surtout pour avantage de prévenir les accidents et utiliser des petites techniques de ce genre. 

Si pas mal ont dû négliger ce genre de choses, je pense que la plupart des élèves y avait pensé. Il n’y avait donc plus qu’à espérer que quelqu’un d’autre ne tombe pas sur ce code. Il ne fallait pas nous faire attraper en train de regarder la lumière du stand, histoire de ne pas donner l’idée aux autres.

Moi — Allons-y.

Satô — Oui !

Ainsi nous étions en route vers un autre endroit pour chercher d’autres codes. Je regardais encore sous l’une des banquettes et remarquai quelque chose.

Moi —Encore un sous un banc.

Satô — Je suppose que c’est un endroit plutôt évident.

Moi — Satô, pourrais-tu monter la garde un moment ?

Satô — Oui, aucun problème.

Je m’assis devant la banquette et me penchai pour regardait à l’intérieur.

Satô — Je pense que tu vas avoir du mal comme ça, non ?

Moi — Y en a un ici !

J’essayai de sentir la base de la banquette, au toucher. Il était vrai que le réflexe était de regarder le sol sous les banquettes, jamais la base elle-même… Je passai alors ma main au niveau de la base, le tissu de la banquette devant être lisse : or là, je sentais quelque chose de différent. Autrement dit, il y avait un autocollant. Je pris alors une photo du dessous du canapé avec mon téléphone et, sans surprise, grâce au flash, j’obtins un QR code identifiable. 

Satô — Wow, t’en as vraiment trouvé un !! Fallait le faire !!

Si j’avais participé seul, je n’aurais jamais pu lire ce QR code puisqu’il fallait prendre une photo et trouver sa localisation exacte, avec la lumière qui allait avec. J’aurais éventuellement pu retourner la banquette, mais il aurait fallu être prêt à dégainer… En bref, avoir Satô avec moi m’aide beaucoup puisque ça me permet de pouvoir le scanner tranquillement plus tard via une photo.

En tout cas, l’établissement ne faisait jamais les choses à moitié.

Ainsi, après avoir trouvé un nouveau code, nous nous dirigeâmes encore ailleurs.

4

Le bateau était peut-être grand, mais les élèves n’étaient pas autorisés à se rendre absolument partout. Les zones de détente, en particulier, étaient forcément les plus fréquentées, ce qui permettait de faire des rencontres inattendues.

Une personne semblait se diriger vers la cafétéria quand une autre allait en direction des chambres. Mais ces deux personnes, allant à priori dans des directions opposées, se calculèrent à un mètre l’une de l’autre.

Hôsen Hé Ryuuen, je me souviendrai de ta petite intervention.

La première personne à prendre la parole était Kazuomi Hôsen, de la 2nde D.

Ryuuen — Et ça va ? Tu arrives à dormir ? Aller, d’ici une semaine tu devrais t’en remettre !

Ryuuen Kakeru répondit avec sarcasme.

Hôsen — Ne t’inquiète pas, ton tour viendra. Mais j’ai de nombreuses nouvelles cibles à buter désormais, et j’ai pas le temps de m’en occuper ici.

Ryuuen — J’espère que tu vas pas prendre une raclée deux fois d’affilée, ce serait sévère !

Ils se provoquèrent à de nombreuses reprises, mais sans jamais brandir les poings.

Hôsen — Haha. Plus important encore, j’ai entendu dire que t’avais secrètement acheté des cartes d’élèves de 2nde mais que tu avais aussi participé à des paris avec Nagumo et d’autres terminale. Tu as dû te faire un paquet de fric !

Ryuuen — Kuku. Qui s’est pissé dessus et t’a tout raconté ? On avait pourtant signé un contrat stipulant que ça devait rester secret !

Avant l’épreuve de l’île déserte, Ryuuen avait approché des 2nde avec une carte « Rente » pour passer un accord avec son groupe. L’idée était que si le groupe gagnait une récompense, il lui en remettait une partie.  Un groupe qui finissait dans la 1ère moitié pouvait espérer un gain de 30 000 points, il fallait donc leur promettre un nombre de points à peu près équivalent pour les convaincre. Toutefois, Ryuuen avait réussi à faire signer de nombreux élèves dans le dos de Nagumo et avait empoché 280 000 points privés. La plupart des camarades de Ryuuen n’étaient même pas au courant, en dehors de ceux qui avaient exécuté ses ordres.

Ryuuen — Si tu me lèches les chaussures, je te donnerai un petit quelque chose pour la gêne occasionnée. OK gorille ?

En riant, Ryuuen s’éloigna sans sortir les mains de ses poches.  Hôsen aurait pu chercher la confrontation et lui barrer la route, néanmoins il se contenta de s’écarter et de le laisser passer. Ishizaki s’empressa de suivre Ryuuen, pendant qu’Hôsen reprit également sa route.

Ishizaki — Il est plus effrayant que jamais. Mais il a tellement peur de toi qu’il t’a laissé passer bien sagement ! 

Ryuuen — Je ne pense pas.

Ishizaki — Mais…

Ryuuen — Il a fait car il ne voulait pas chercher la merde.

En croisant Hôsen, Ryuuen avait senti une aura meurtrière.

Ishizaki — Fait chier.

Ryuuen — Pense à autre chose. Je sais que c’est un gros morceau, mais faut d’abord trouver les coupables pour tu sais quoi.

Ishizaki — Comme d’hab’, je vais demander à Nishino de s’en occuper.

Ishizaki, qui sortit son téléphone portable pour contacter sa camarade, continua aux côtés de Ryuuen. Peu après, Ryuuen et ses amis arrivèrent à destination. Avant qu’Ishizaki ne puisse dire ses prochains mots, Ryuuen s’approcha d’une des filles.

Ryuuen — Nanase Tsubasa, n’est-ce pas ?

Nanase — Oui, c’est bien moi. Que puis-je faire pour toi ?

Nanase, coupée dans son élan, fixa Ryuuen sans paniquer. Elle ne devait pas comprendre pourquoi elle était accostée par un de ses senpai.

Ryuuen — Désolé, mais je vais avoir besoin d’un peu de ton temps.

À l’origine, la présence de Ryuuen et d’Ishizaki suffisait, mais ils laissèrent Nishino, la fille dont ils se servaient pour la filature, les accompagner. Parce qu’ils savaient qu’il valait mieux être accompagné d’une autre fille pour prendre contact avec une élève plus jeune.

Ryuuen — J’ai un truc à te demander à propos de l’exam sur l’île.

Nanase — L’examen… Je suis toute ouïe.

Nanase ne saisissait toujours pas la situation, mais la proposition suivante de Ryuuen la lui fit comprendre tout de suite.

Ryuuen — Un de mes camarades a été blessé. Je cherche le coupable.

Nanase — Et pourquoi moi ?

Ryuuen — Les cinq premières personnes à avoir été sur les lieux étaient Sudou, Ayanokôji, Ike, Hondo et toi. J’élimine d’office Sudou, Ike et Hondo qui avaient l’air de ne rien savoir.

Nanase — Et pourquoi ne pas demander à Ayanokôji-senpai alors ?

Nanase — C’est prévu, mais nous allons commencer par toi… Déjà t’étais collé à lui pendant tout l’examen. On peut savoir pourquoi ?

Nanase — Cela n’a rien à voir avec l’incident.

Ryuuen — Ça, ce sera à moi d’en juger après t’avoir entendue.

Face à l’autoritaire Ryuuen, la plupart des gens auraient tout de suite parlé. 

Nanase — Je suis désolée, mais je n’ai rien à te dire.

Mais Nanase, au lieu d’hésiter, refusa calmement. Elle baissa la tête et tenta de partir, mais Ryuuen lui donna un coup de pied dans la jambe, lui faisant heurter son pied contre le mur.

Ryuuen — Hé, tu vas pas nous fausser compagnie comme ça poulette.

Nanase — C’est assez violent, tu en conviendras. J’ai bien peur que vous ayez des problèmes si quelqu’un vous voit dans cette situation.

Ryuuen — Ne t’en fais pas, j’ai quelques autres gars qui surveillent pour s’assurer que ça n’arrive pas.

Nanase — Je comprends que ton camarade a été blessé mais je ne pense pas pouvoir t’aider. Je n’ai aucune idée de ce qui s’est passé.

Ryuuen — Ah ouais ? Pourquoi tu gesticulais autant ces derniers jours ?

Nanase — Je n’ai pas la moindre idée de quoi tu parles.

Avec cette réponse, Ryuuen put rebondir.

Ryuuen — Tu as pas mal observé Kurachi, un élève de 2nde C, pendant que tous les autres s’amusaient. Non ?

Nanase — …

Pour la première fois, elle ouvrit les yeux et montra des signes d’anxiété.

Ryuuen — Après avoir entendu la version de Komiya, je gardais également un œil sur Sudou, Ike et Hondô. Mais ces trois-là s’amusaient comme des petits fous contrairement à toi. Tu ne profites pas de tes vacs et tu suis un 2nde. Ton comportement est suspect.

Nanase — Ce n’est rien de spécial.

Ryuuen — Et pourquoi tu ne cherches pas les QR codes ? Tout simplement parce que tu continuais ta filature. Nishino est témoin.

La chasse au trésor impliquait de chercher des QR codes. Mais Nanase était plutôt occupée à suivre cet élève, Kurachi, sans même d’ailleurs remarquer qu’elle-même était suivie.

Nanase — Quelle sotte je suis. Ne même pas avoir remarqué que j’étais surveillée.

Ryuuen — Tu devrais être reconnaissante que je te contacte gentiment.

Nanase — Et tu m’en vois ravie, Ryuuen-senpai. Mais Komiya-kun n’est pas lié de près ou de loin à Kurachi-kun.

Ryuuen — Bien, alors je parlerai directement à Kurachi.

Nanase — Ce serait ennuyeux.

Ryuuen — Et tu pourrais me dire pourquoi ? Ou alors va falloir qu’on t’aide un petit peu ?

Nanase — Ce qui n’est pas pertinent n’est pas pertinent, après tout.

Ryuuen — C’est pas à toi d’en juger je t’ai dit !

Ryuuen arborait toujours un sourire sur son visage, mais son aura avait changé. Ishizaki, qui regardait de côté, était lui-même intimidé alors qu’il n’était même pas la victime ici.

Nanase — Tu n’es pas habilité non plus à faire un tel jugement.

Nanase avait regardé Ryuuen droit dans les yeux sans montrer aucune gêne.

Ryuuen — Tu te demandes ce que tu dois faire, hein ?

Certainement, Tsubasa Nanase était perdue. C’était au milieu de l’épreuve de l’île que la cause du problème était apparue. Cela remontait au jour où elle avait déchaîné sa rage incontrôlable sur Ayanokôji, avant qu’Amasawa ne soit apparue devant eux avec une arme.

Ayanokôji avait supposé qu’Amasawa n’était pas seule, mais avait prétexté n’avoir fait aucune recherche GPS. Peut-être ne voulait-il pas en savoir plus. À l’inverse de Nanase, qui en avait fait secrètement. Deux personnes, à l’exception d’Amasawa, étaient dans les alentours de Nanase : Kikyô Kushida, en 1ère, et Naohiro Kurachi en 2nde. Tous deux auraient dû faire l’objet d’une enquête, mais Ayanokôji avait peut-être volontairement fermé les yeux sur Kushida puisqu’elle était sa camarade de classe.

Ryuuen — On perd notre temps. On va lui parler direct.

Nanase baissa les yeux comme si elle s’était résignée, mais releva immédiatement le visage.

Nanase — J’ai peur de ne pas savoir où il est sur le bateau dans la mesure où il participe à la chasse au trésor.

Ryuuen ricana et sortit son téléphone portable.

Ryuuen —Quatrième étage, au niveau des cabines ? Ok, j’arrive.

Ryuuen, qui avait visiblement tout prévu, termina brièvement l’appel.

Nanase — Tu avais quelqu’un qui surveillait Kurachi-kun après m’avoir éloignée de lui, n’est-ce pas ?

Ryuuen — Contrairement à toi, j’ai beaucoup de personnes qui peuvent être mes bras et mes jambes, mes yeux et mes oreilles.

Nanase — Kurachi-kun n’a rien à voir avec ça.

Ryuuen — Aucune importance, si j’élimine tous les potentiels suspects.

Que ce soit pour Nanase ou Ryuuen, Kurachi était leur seule piste.

Ryuuen — Aller, décide-toi. 

Inutile de dire que si Nanase l’ignorait, Ryuuen allait se précipiter sur Kurachi lui-même. Nanase hocha la tête et décida donc de suivre Ryuuen. Actuellement, Kurachi participait à l’évènement avec son binôme, Taguri.

Nanase — Laisse-moi avoir une discussion seule avec Kurachi-kun.

Ryuuen — Quoi ?

Nanase — Je vais obtenir l’information pour toi.

Ryuuen — Qu’est-ce qui me fait dire ça ?

Nanase — Tu dois me faire confiance.

Ryuuen — Je crois pas, nan.

Nanase — Tu n’as pas vraiment le choix, même si tu ne me fais pas confiance je te dirai ce que je saurai.

Ryuuen — T’as pas intérêt à me la faire à l’envers car meuf ou pas je ne te ferai aucun cadeau.

Nanase — J’en suis bien consciente.

Ryuuen donna des instructions à Nishino et Ishizaki, d’un signe de tête, et éloigna Taguri de Kurachi. N’importe quel élève de 2nde approché par Ishizaki et son équipe obtempérerait sans discuter.

Nanase — Puis-je avoir un moment, Kurachi-kun ?

Kurachi — Huh ? Bien sûr. Tu es Nanase …… de la classe D, non ?

Il était visiblement perturbé quand Taguri avait été abordé par ses senpais.

Nanase — J’ai quelque chose à te demander.

Kurachi — Désolé, mais je suis un peu occupé là…

Nanase — Pourquoi visais-tu Ayanokôji-senpai sur l’île ?

Kurachi — Hein ? De quoi tu parles ?

Il ne valait mieux pas qu’elle mette trop de temps au risque que Ryuuen ne s’impatiente et ne prenne lui-même les choses en main.

Nanase — Inutile de le cacher. Pendant la forte pluie du septième jour, j’ai utilisé mon GPS pour savoir qui se trouvait dans les environs. Il n’y avait qu’Amasawa-san et une autre personne, toi. À proximité se trouvaient des outils pouvant être utilisés dans le cadre de violence. 

Kurachi — Qu’est-ce que tu veux dire ?

Kurachi, niant en bloc, tenta de s’échapper, mais Nanase lui attrapa le bras.

Nanase — Tu vois l’élève de 1ère derrière moi ? Il essaie désespérément de trouver le coupable qui a presque attaqué Ayanokôji-senpai. Et je préfère t’avertir qu’il est d’une violence inouïe.

Kurachi — Quoi, tu rigoles ?

Nanase — Il serait donc plus judicieux que tu ne les contraries pas.

Kurachi — Non ! Mais je ne suis pas ……, je suis juste …… !

Nanase — Juste ?

Kurachi — On m’a promis des points si j’attaquais Ayanokôji-senpai.

Nanase — De l’argent, donc…

Kurachi — Normalement, je ne l’aurais pas accepté. Mais j’ai utilisé tous mes points privés, et…

Nanase — Et ?

Kurachi — Ils m’ont dit de faire « semblant » de l’attaquer et que ce ne serait pas grave. Je n’ai rien fait de mal, tu le sais non ?

Il est vrai qu’une tentative d’agression peut, dans le pire des cas, être interprétée comme une petite blague ou un accident.

Nanase — Qui au juste t’a fait cette proposition ? Et quand ?

Kurachi — C’était avant l’examen…

Nanase — Avant l’examen ?

Nanase était très surprise de ce développement inattendu.

Nanase — En d’autres termes, c’était prévu de longue date…

Kurachi — Mes points privés ont été transférés anonymement.

Nanase — Tu mens.

Kurachi — Quoi ? Bien sûr que non !

Nanase — On dirait bien que tu fais de la rétention d’information.

Kurachi — Je ne sais rien du tout, je t’assure.

Nanase — Tu n’en as guère conscience, mais à cause de tes actions les plans de Hôsen-kun et de Ryuuen-senpai ont été chamboulés.

Kurachi fronça les sourcils une fois que la conversation prit cette direction.

Nanase — Maintenant, lui aussi cherche désespérément le coupable. Et si je l’informais ? Je suis sûr que Hôsen-kun viendra se charger de toi.

Ryuuen, un 1ère, et Hôsen, un 2nde. Les deux, plus menaçants l’un que l’autres, risquaient de s’en prendre à lui.

Kurachi — Attends, attends !! Ok je vais parler !!

Hôsen était le plus détesté et le plus craint des élèves de 2nde. L’efficacité de son nom avait dépassé les espérances de Nanase.

Kurachi — …C’est mon camarade de classe, Utomiya.

Nanase — Utomiya-kun ?

Kurachi — Oui. Il voulait que je m’en prenne à Ayanokôji-senpai en échange de points privés. 

Nanase — C’est vrai ?

Kurachi — Si je te le dis !

En le regardant dans les yeux de Kurachi, Nanase confirma.

Nanase — Je te fais confiance, Kurachi-kun. Enfin, une dernière chose, sais-tu quelque chose sur les blessures de Komiya-senpai?

Kurachi — Komiya ? Alors non, je n’en sais pas plus que toi. Enfin, dans tous les cas, n’en parle pas à Hôsen, d’accord !

Nanase — Je comprends. Je te le promets.

Nanase permit à Kurachi de partir. Taguri fut libéré au même moment. Ryuuen, qui s’approcha tout de suite, exigea de Nanase qu’elle parle. Kurachi ne semblait rien savoir sur Komiya. S’il ne croyait pas en Nanase, il avait pu au moins observer de loin que Kurachi semblait sincère.

Nanase — Utomiya-kun pourrait savoir quelque chose à ce sujet.

Ryuuen — Utomiya ?

Nanase — Utomiya Riku, un camarade de Kurachi-kun, en 2nde C.

Ryuuen sortit immédiatement son téléphone portable et confirma le visage d’Utomiya et ses compétences OAA.

Ryuuen — Sa tête me dit rien mais il a un A en capacité physique.

Nanase — On ne peut plus suffisant pour pousser Komiya-senpai par exemple.  Mais nous n’avons pas de preuve.

Ryuuen — Si on veut, oui.

Nanase — Que vas-tu faire ?

Ryuuen — C’est décidé, je vais poursuivre cet Utomiya et le faire parler.

Nanase — Une petite minute. Je ne suis pas d’accord.

Si Utomiya était un élève de la White Room, traiter avait lui allait être difficile peu importe le nombre de « Ryuuen » à ses trousses. En plus de cela, il aurait peut-être été préférable d’en parler à Ayanokôji au préalable.

Nanase — Même si Utomiya était coupable, le manque de preuve fait qu’il ne risque absolument rien.

Ryuuen — Kurachi vient de parler, tout dépend de la façon dont on menace les gens.

Nanase — Je le suivais depuis quelques jours et ai pu tâter le terrain. Je savais plus ou moins que je pouvais le pousser à bout. Concernant Utomiya-kun, c’est une autre paire de manches.

Ryuuen — Que veux-tu que je fasse ?

Nanase — Laisse-moi un peu de temps. Et je te demande ça sans contrepartie.

Ryuuen — Huh ?

Nanase — J’ai gardé le silence, mais il y a un témoin que tu ne connais pas senpai dans l’affaire Komiya-senpai. Ça ne me dérange pas de te dire qui est cette personne.

Ryuuen — Je t’écoute. C’est qui ?

Nanase — Je ne peux pas te le dire maintenant. Je te le dirai si tu t’abstiens de contacter Utomiya-kun.

Ryuuen — Tu négocies durement. Bon, d’accord, je te crois sur parole.

Nanase — Merci beaucoup. Je te tiens au courant.

Ryuuen — Mais si tu mens, gare à tes fesses. Ok ?

Nanase — Je ne mens pas.

Ryuuen — Kuku, si tu le dis. Allez vas-y, contacte-moi au plus vite avant que je ne perdre patience !

Elle fit un léger hochement de tête rapide avant de quitter les lieux.

5

Je trouvai plusieurs QR codes, mais un seul sembla intéressant. Je pus voir plusieurs élèves dans mon champ de vision cherchant des codes alors il y avait de la concurrence. Seuls les participants pouvaient jouer, ce qui limitait la triche organisée, mais avec plus de 200 participants c’était inévitable. Tout à coup, je me rendis compte que Satô s’était arrêtée et retournée.

Satô — Qu’est-ce que je dois faire ? Qu’est-ce que je dois faire pour ne pas être un poids ?

Moi — Qu’est-ce qui te prend ?

Satô — Désolée de t’avoir posé une question aussi étrange, mais ce n’est pas sorti de nulle part. J’y pense depuis bien avant notre arrivée sur l’île. Je me demandais comment je pouvais être utile à la classe.

Satô regarda alors ses paumes.

Satô — Je pensais que ma vie de lycée serait normale à la seule différence où il y avait la promesse que l’on trouverait un emploi dans le secteur de notre choix. Mais cet établissement est clairement d’un tout autre niveau. Je n’arrive clairement pas à suivre le rythme.

Pour le dire plus crûment, Satô avait des capacités générales inférieures à celles du lycéen moyen. Mais avec un peu d’effort, on pouvait clairement améliorer ne serait-ce qu’une aptitude qu’elle soit académique, physique ou autre. Sudou était un bon exemple dans la mesure où il avait amélioré drastiquement ses capacités académiques en revenant de très loin.

Moi — Si tu veux être utile à tes camarades, tu vas devoir étudier.

Satô — Oui…

Elle le savait bien… Ainsi, elle finit par baisser la tête et se gratta la joue.

Satô — Oh du coup… Tu vas m’aider pour ça n’est-ce pas Ayanokôji ?

Moi — Moi ?

À ce moment-là, Satô mit aussitôt ses mains en avant et les agita.

Satô — Désolée, oublie ça ! Karuizawa-san ne va pas apprécier !

Moi — Pourquoi ne pas demander à Horikita ?

Satô — Horikita-san ? Je ne m’entends pas très bien avec elle.

Le « pas très bien » était un euphémisme. Pendant presque un an et demi, Satô et Horikita n’avaient eu littéralement aucune interaction.

Moi — Peut-être mais sache qu’elle est douée pour enseigner. N’oublie pas que c’est elle qui est à l’origine de l’amélioration de Sudou.

Il n’était pas nécessaire de vanter encore plus les mérites de Horikita. Après tout, elle avait réussi à faire travailler la personne la plus problématique de l’établissement.

Satô — Sudou-kun m’a dépassée sans que je ne le réalise.

Moi — J’imagine que tu veux éviter l’étiquette de cancre de la classe ?

Satô — Effectivement.

Satô était l’une des potentielles candidates à la dernière place de notre classe. La situation était alarmante pour elle.

Satô — Alors, Ayanokôji-kun, tu peux servir d’intermédiaire ?

Moi — Si ce n’est que ça, je le ferai.

Si ça pouvait améliorer les résultats scolaires de la classe, Horikita n’allait pas refuser. Sudou avait dit que c’était plus dur pour lui de réviser avec d’autres gens, mais pour le bien commun il allait sûrement accepter.

6

(Horikita)

— Horikita-senpai, c’est mon tour. Tu peux prendre ta pause

Environ deux heures après le début de la chasse au trésor, vers midi, Yagami-kun vint me voir. Je fermai les yeux sur la liste des élèves de seconde et les ouvris ensuite lentement.

Moi — Je ne suis pas particulièrement fatiguée et cela ne me dérange pas de continuer à vérifier l’attribution des récompenses.

Je voulais profiter du peu monde autour pour regarder.

Yagami — Ça ne peut pas marcher comme ça. On m’a confié une mission. Si je te laisse tout le travail Horikita-senpai, je ne pourrais pas me considérer comme un digne membre du Conseil des élèves.

Moi — ……Tu as raison.

Il avait la bonne mentalité. Ainsi, je n’insistai pas et tirai ma chaise vers l’arrière.

Moi — Je prends congé alors. Merci à toi.

Yagami — Je t’en prie.

J’allais être de retour vers 14h pour vérifier de nouveau les attributions avant d’en terminer pour de bon. Ce n’était pas une tâche difficile mais ça demandait du temps, tout de même.

Yagami — Horikita-senpai, combien de personnes ont reçu leurs récompenses jusqu’à présent ?

Il regarda la liste des noms tout en me demandant cela.

Moi — Environ 40 personnes en comptant les binômes. Il y a des élèves qui ont obtenu 500 000 points, mais la majorité n’a pas eu cette chance et n’a obtenu que 5 000 points.

Yagami — Ils sont pressés de scanner le QR code trouvé qu’ils pensent meilleur que les autres et, au final, paient leur précipitation.

En effet, il n’y avait aucune garantie que l’on retrouve ce QR code après. Quoi qu’il en soit, ce n’était pas la présence de Yagami qui m’intriguait mais celle d’une autre personne. Yagami-kun se tourna vers cette dernière et lui sourit.

Yagami — À plus tard, Kushida-senpai.

J’avais entendu dire qu’ils étaient très proches depuis le collège.

Kushida — À plus, Yagami-kun.

Sa manière de le saluer montra clairement qu’il y avait plus que de l’amitié. Mais ce n’était pas non plus de l’amour.

Yagami — Si tu as besoin de quelque chose, n’hésite pas.

Kushida — Avec plaisir.

Bien que Yagami-kun fasse partie du Conseil des élèves seulement depuis peu et qu’il était du genre à prendre les choses pour acquises, il savait très bien s’exprimer. Qui plus est, c’était un Kôhai fiable, bien plus dégourdi que ces deux autres élèves de seconde qui avaient rejoint le Conseil en même temps que lui. Il avait encore beaucoup de chemin à parcourir mais il était le meilleur candidat à la présidence de sa génération. Quand je quittai mon poste, Kushida-san ne resta pas non plus avec Yagami-kun et nous finîmes par marcher côte à côte. Cette scène était icônique.

Moi — Tu étais avec Yagami-kun, n’est-ce pas ? Pourquoi n’as-tu pas participé à la chasse au trésor, Kushida-san ?

Kushida — Hmm. Comme ça. Je suis loin d’être un cas isolé.

Moi — Il est vrai que le taux de participation des première et terminale n’est pas élevé.

Ils avaient donné la priorité aux vacances plutôt qu’à la possibilité de gagner beaucoup de points privés. Le temps sur ce bateau était en effet précieux.

Kushida — Horikita-san, ça te dit qu’on déjeune ensemble ?

Moi — Avec moi ?

Je ne pus cacher ma méfiance à cette proposition inattendue de Kushida-san.

Kushida — Tu trouves ça bizarre ? J’imagine que ça l’est…

Elle eut un sourire amusé mais c’était son masque habituel. Il n’y avait probablement pas d’arrière-pensée derrière.

Moi — Eh bien, j’ai encore des tâches à finir pour le Conseil mais je comptais me prendre quelque chose au stand en vitesse.

Kushida — Ça me va.

Les occasions d’avoir un tête-à-tête avec Kushida-san étaient rares. C’était une bonne occasion pour lui poser toutes les questions que j’avais à l’esprit.

Moi — Permets-moi de te poser une petite question.

Pour gagner du temps, je décidai de parler pendant notre marche.

Kushida — Pourquoi je t’ai proposé de déjeuner ensemble ?

Moi — C’est une partie du problème certes, mais…

Kushida — La raison pour laquelle je suis si proche de Yagami-kun ?

Pour elle, ces questions qui me trottaient l’esprit étaient une évidence.

Moi — Je mentirais si je disais que ça ne m’intriguais pas.

Son comportement ambigu m’avait toujours dérangé de toute manière.

Moi — Tu caches ton passé et comme nous étions au même collège, tu essaies de te débarrasser d’Ayanokôji-kun et moi qui en savons beaucoup trop sur toi désormais.

Kushida-san m’écoutait tout en regardant devant elle.

Moi — Même si tu es du genre à bien t’entendre avec tout le monde, j’ai l’impression que tu évitais de socialiser avec les garçons. Mais ça a l’air différent avec Yagami-kun qui, pourtant,  connait lui aussi ton passé.

Kushida — Même si tu le penses, pourquoi me le dire ?

Moi — Effectivement. Je m’excuse de t’avoir contrariée.

Kushida — Haha, ne t’en fais pas, je ne suis pas en colère.

Je ne voulais pas la blesser. C’était seulement mes impressions personnelles. J’avais été négligente mais c’était trop tard pour me rattraper. 

Kushida — Pourquoi penses-tu que je suis si proche de Yagami-kun ?

Je recevais le retour du bâton maintenant.

Moi — Se pourrait-il que…Yagami et toi ayez ce genre de relation ?

J’hésitai à l’exprimer directement, alors mes propos furent confus.

Kushida — Une relation amoureuse ?

Moi — Oui…

Kushida — Non. Bien sûr que non. Je n’ai pas l’intention de sortir avec quelqu’un durant ma scolarité ici.

Elle essayait clairement de préserver le statu quo. Même si je ne m’intéressais pas à elle, je savais que Kushida-san était très populaire chez les garçons. Je n’étais pas spécialiste de la chose mais il était inévitable que sa popularité diminuerait si elle se trouvait un petit ami, qu’il soit un kôhai ou non. Or Kushida voulait être adulée de tous.

Moi — Alors pourquoi es-tu si proche de Yagami-kun ?

Kushida — C’est pourtant évident. Tu es vraiment drôle ma parole.

Dit-elle en pressant ses mains contre sa bouche afin d’atténuer son rire.

Kushida — Le meilleur moyen de se débarrasser de quelqu’un de gênant est de le garder proche de soi.

Moi — Je vois.

Je m’en doutais un peu mais je ne m’attendais pas à ce qu’elle l’admette aussi facilement, qui plus est en souriant. Ainsi, Yagami était une cible à éliminer, tout comme Ayanokôji-kun et moi. Mais cela ne signifiait pas que tous mes doutes étaient partis.

Moi — Il connaitrait ton passé ? Tu n’en es pas sûre non ?

Kushida — Eh bien, oui, rien ne dit qu’il est au courant.

Moi — Alors…

Kushida — Mais peut-être fait-il semblant de ne rien savoir.

Poursuivit Kushida, toujours avec le sourire.

Kushida — Yagami-kun semble avoir des sentiments pour moi alors rester proche de lui est un jeu d’enfant. J’attends juste la faille.

Tant qu’il n’y avait pas 0% de chance de connaître son passé, on devenait automatiquement sa cible. Même un kôhai, ne faisait pas exception.

Moi — Tu ne fais que te rajouter des ennemis. Après tout, Ayanokôji-kun et moi n’avons toujours pas été expulsés.

Kushida — Tu penses que c’est stupide de ma part ?

En tout cas, ce n’était en rien intelligent.

Moi — Nous ne devrions pas être ennemis. Ce n’est pas comme si Ayanokôji-kun ou moi allions dire quelque chose.

Le fait qu’elle ne voulait rien savoir me laissait perplexe mais j’avais fait un pas là où je ne m’étais jamais aventurée auparavant.

Kushida — Peux-tu me le garantir à 100% ?

Moi — C’est proche de 100%, mais j’imagine que ça ne te suffit pas.

Kushida — Tu connais le passé que je veux protéger. Mon cœur est exposé alors tu pourras utiliser cette faiblesse contre moi plus tard.

Moi — Je ne comprends pas et je n’en ai clairement pas besoin.

Kushida — Ce n’est pas une question de besoin mais d’opportunité.

Moi — Comment ça ?

Kushida — Et si je tente de divulguer un secret de la classe à une autre classe ? Comment puis-je être sûre que toi et les autres ne saisirez pas l’occasion de me menacer en tentant de révéler mon passé ?

Moi — C’est…

Si la situation l’exigeait, je ne pouvais rien garantir. Pour protéger ses camarades, on pouvait recourir à ce genre d’extrémités.

Bien sûr, si ça arrivait, Kushida tenterait de réparer les pots cassés mais sa réputation en prendrait forcément un coup. On l’avait bien vu la dernière fois lors du vote de classe avec Yamauchi.

Kushida — Vraiment ça me frustre de parler de ça. Ça me fait mal et j’en ai la nausée.

Malgré ses paroles, elle affichait toujours un sourire et le ton de sa voix était toujours calme. Elle arrivait à masquer sa colère.

Moi — Je comprends un peu mais tu réfléchis trop. Je m’inquiète.

Kushida — Oh, vraiment ? Tu t’inquiètes pour moi ?

Moi — J’aimerais alléger ta charge mentale en effet.

Kushida — Ne t’inquiète pas pour moi, Horikita. Je vais m’en sortir.

Moi — Tu es sûre ?

Kushida — J’essaie de mettre un terme à tous ces désagréments…

Moi — Tu veux dire que…

Kushida — J’ai un moyen efficace pour me débarrasser de ce fardeau.

Moi — Tu m’a approchée avec une idée alors ?

Kushida — J’ai beaucoup réfléchi. Si la situation reste aussi instable, de plus en plus de personnes découvriront des choses inutiles sur moi. Alors Horikita-san, es-tu prête à partir de cet établissement ?

Naturellement, la manière la plus efficace d’alléger sa charge mentale était de partir. Bien sûr, je ne pouvais accepter. Et ça ne résolvait pas tout.

Moi — Et Ayanokôji-kun ? Yagami-kun ? Même si je pars, il y aura toujours une menace

Kushida — Je suis bien consciente qu’Ayanokôji-kun est un adversaire difficile à faire tomber. Mais savais-tu qu’il me versait des points privés ?

Moi — Quoi…?

En réalité, Ayanokôji-kun me l’avait bien dit.   Mais j’avais décidé de faire semblant de ne pas savoir de quoi elle parlait afin de voir sa réaction.

Kushida — J’imagine que c’est sa manière à lui de se défendre face à une potentielle expulsion. Cela montre qu’il me prend au sérieux et qu’il a peur de moi. Si j’essaie de me débarrasser de toi, Horikita-san, Ayanokôji-kun n’aura pas d’autre choix que de se taire car s’il fait quelque chose de mal, je le ferai expulser.

Son visage se rapprocha du mien et elle fit un sourire bien effrayant cette fois.

Kushida — Même si tu étais la seule à être exclue, ça me soulagerait déjà un peu en attendant de trouver un moyen de me débarrasser d’Ayanokôji-kun. Quant à Yagami, il n’est pas un problème. C’est juste un gars qui m’aime bien.

Ses grands yeux semblaient avoir de la couleur, mais ils étaient au fond vides.

On pouvait lire les émotions en regardant les yeux, mais il n’y a qu’avec Kushida que je n’y arrivais pas. En tout cas, sa volonté ferme d’expulser tout élève connaissant son passé n’avait pas faibli d’un poil.

Kushida — La raison pour laquelle je veux que tu disparaisses en premier est parce que tu étais dans le même collège que moi. Si on enquête, d’autres découvriront cette info. Mais pour Ayanokôji-kun, je pourrais dire qu’il ment car on ne se connait que depuis le lycée.

Elle n’avait pas tort. Elle préférait de loin m’expulser rien que pour ce détail.

Kushida — Tu penses que ce n’est pas facile de faire expulser quelqu’un n’est-ce pas ? Tu te dis que ça fait plus d’un an et demi que tu n’as rien eu alors tu penses être tranquille.

Moi — Si nous étions dans des classes différentes, ça aurait pu être une possibilité. Mais difficile d’expulser un camarade de classe.

Kushida — Je te montrerai alors.

Moi — On ne peut pas s’entendre ? Je veux monter en classe A avec tout le monde, toi y compris. Et pour cela, ton aide est essentielle.

Kushida — Quelle idio…

Elle m’insulta si doucement que je n’entendis pas la fin.

Kushida — Je ne coopérerai pas avec toi. Arrête avec ta guimauve.

Moi — Kushida-san….

Kushida — J’ai hâte que les vacances se terminent. Je suis persuadée que nous allons passer des moments agréables ensemble.

La malice avait disparu de son regard. Cependant, il était clair que derrière ce sourire se cachait un mélange de haine et de colère.

Moi — Je vois que ce n’est pas possible.

Elle se détourna de moi, comme si elle en avait assez de parler.

Moi — Mais je suis sûre que tu comprendras ,un jour…

Ces mots durent atteindre ses oreilles, mais elle ne s’arrêta pas.

7

Il était 14 heures passé. Il restait encore beaucoup de temps avant la fin de la chasse au trésor, mais nous avions déjà visité la plupart des lieux. Il y avait six QR codes au total que j’avais pris en photo. Trois d’entre eux avaient un niveau de difficulté d’obtention de 4 sur 5.

Moi — Tu peux ouvrir ton app pour scanner les QR codes ?

Satô — Je scanne lequel en premier ?

Moi — Vas-y à l’instinct, Satô.

Satô — Quoi ? Et si je me trompe ?

Moi — Commence par les QR codes que j’ai sélectionnés. Il est possible qu’ils soient déjà scannés donc nous n’avons rien à perdre.

Il fallait prendre une décision rapidement.

Satô — Heu…ok.

Elle sortit son téléphone portable et regarda mes photos. Elle sembla inquiète pendant quelques secondes, puis décida de pointer son téléphone portable sur l’une d’entre-elles. C’était un QR code que j’avais trouvé en mettant mon téléphone sous le canapé, mais…

Satô — Oh, non. Ça a déjà été scanné.

Il était assez difficile à trouver, mais nous n’avions pas été les premiers.

Moi — Ce n’est pas grave. Passe au suivant.

 Elle hocha la tête, et cette fois, sans hésitation, scanna le QR code

Satô — Déjà scanné. Ah, c’est tellement frustrant.

Moi — Passe vite au troisième QR code.

Après cela, Sato fixa l’écran pendant un moment, puis sauta de joie.

Satô — Ça marche ! Y’a comme un coffre à trésor !

C’était une simple illustration, mais il y avait un coffre avec le mot « tapez ».

Satô — Je me demande combien de points il y a dedans.

Satô tenta de toucher le coffre avec son index, mais s’arrêta juste avant que son doigt ne le touche.

Satô — T…Tu peux le faire, A-Ayanokôji-kun ?

Apparemment effrayée de voir les résultats, elle me tendit son portable. Vu qu’elle avait payé 10 000 points pour jouer, il n’était pas étonnant qu’elle ait peur de voir les résultats. Ainsi je pris le portable et touchai le coffre.

Satô — Wow, Ayanokôji-kun, tu n’as même pas hésité.

Ce n’était pas non plus quelque chose de grandiose. Lorsque le coffre au trésor brilla, une lumière bleue s’extirpa de la boîte. Et puis…

Satô — Oh ! …… Oh !

Pendant un moment, Satô fut surprise, mais elle déchanta très vite. En effet, ce n’était pas 1 million de points qui sortit mais 100 000 points. Elle s’attendait à recevoir 300 000, 500 000 ou plus alors elle était un peu déçue.

Moi — Apparemment, ce QR code n’était pas si difficile à obtenir.

Satô Je vois~ …… Quel dommage.

Moi — En retirant les points d’inscription, ça représente quand même 90 000 points de gain. C’est quand même pas mal.  

Je n’avais pas besoin de le montrer mais c’était clairement une expérience enrichissante.

Satô — Merci beaucoup, Ayanokôji-kun.

Moi — C’est moi qui devrais te remercier. C’est toi qui as trouvé ce QR code après tout.

Satô — ……Héhé…

Satô sourit, à la fois heureuse et embarrassée.

8

Les élèves ayant scanné un QR code étaient tenus de le signaler.  Ainsi, Satô et moi retournâmes au point de départ pour voir Horikita à la réception.

Horikita — Merci pour votre travail acharné, tout est enregistré.

Après cela, Satô exprima sa joie avec sincérité.

Satô — Merci Ayanokôji-kun. Faudra qu’on se refasse ça un moment.

Satô fit un signe de la main et partit joyeusement. Ce ne fut pas une mauvaise idée de passer du bon temps tout en obtenant des points privés.

Moi — Un total de 180 000 points à deux, en enlevant l’inscription.

Horikita — En effet, c’est un beau résultat.

À cette heure de la journée, il restait peu de participants.

Moi — Ça a dû être éprouvant n’est-ce pas ? Tu as fait une pause ?

Horikita — Oui, d’une heure, alors je ne vais pas me plaindre. Concernant le fait de m’occuper de la prévention de la fraude, c’était mon idée alors il faut assumer.

Moi — C’est encore un petit pas vers la présidence du Conseil.

 Le Conseil et l’établissement appréciaient ce genre d’initiatives.

Horikita — Pas vraiment. Ce n’est pas mon objectif. Je voulais tout simplement aider.

Horikita eut l’air d’avoir tourné son regard vers l’horizon.

Moi — Alors, qui a eu le plus de points privés dans la classe ?

Horikita — Devine.

Je ne m’attendais pas à ce qu’elle me retourne la chose.

Moi — J’espère que ce n’est pas mon binôme.

Horikita — Il vaut mieux en effet. 500 000 points privés ont été empochés par Kôenji-kun et Wang-san[1].

Moi — Kôenji ? Je suis surpris qu’il participe, et surtout en binôme.

Comme il y avait beaucoup de personnes, je n’avais pas remarqué Kôenji.

Horikita — Je suis bien d’accord. Je ne sais pas comment il s’est retrouvé là-dedans mais il a beaucoup gagné si on compte l’île.

Moi — Kôenji est vraiment extraordinaire sur tous les plans.

En plus de ses incroyables capacités physiques, il avait beaucoup de chance. Ou alors c’était sa partenaire qui avait géré la chose.

Horikita — Dommage qu’on ne puisse pas compter sur Kôenji-kun dans le futur. On perd un gros atout.

Moi — Il se fiche de la lutte des classes alors pourquoi ne pas te contenter de cette première place sur l’île ?

Horikita — M’en contenter ? Tu rigoles ? C’est clairement une perte pour notre ascension. Ou alors tu as de meilleures idées ?

Chercher à trouver un moyen de le dompter était une perte de temps.

Moi — Pas du tout.

Horikita — Tu as répondu sans hésitation.

Je pouvais contrôler un certain nombre de personnes mais Kôenji était une exception. Après diverses simulations effectuées sur mes camarades, il était le seul à avoir échappé à mon contrôle malgré plusieurs tentatives.

Horikita — Même si tu abandonnes, ce n’est pas mon intention. Ses capacités sont vitales pour notre classe.

Dompter l’indomptable ne menait à rien. C’était une contradiction.

Moi — Même si c’est une perte de temps ?

Horikita — Tu penses vraiment qu’on puisse se passer de Kôenji-kun ?

Moi — Tant qu’il ne nuit pas à la classe, mieux vaut le laisser tranquille. Et puis il a un point de protection maintenant.

Horikita — On peut voir les choses comme ça.

Moi — Je comprendrais s’il était la seule force de la classe mais ce n’est pas le cas, et puis la classe se renforce de jour en jour.

Horikita — C’est sûr que nous sommes plus forts qu’avant.

Horikita continua.

Horikita — Viser la classe A est notre objectif ultime mais je veux unir la classe. Je veux que tout le monde coopère.

Moi — Je vois. Même Kôenji est dans l’équation.

Son regard assuré m’étouffa quelque peu. Si Horikita réussissait à faire coopérer Kôenji, il aurait indiscutablement été un allié formidable. Mais c’était une tâche bien plus difficile que d’atteindre la Classe A. Dans le passé, je n’aurais jamais pris cette déclaration au sérieux mais Horikita changeait lentement mais sûrement. Je ne pouvais pas dire à l’heure actuelle si elle allait réussir mais, à mon sens, il valait mieux rechercher d’autres forces dans notre classe. Et il n’y avait clairement pas que celle de Kôenji.

Horikita — Qu’est-ce qu’il y a ?

Moi — Quoi ?

Horikita — Tu avais l’air distrait.

Moi — Non, j’essayais de trouver quoi faire avec mes points privés.

Horikita — C’est vrai que tu donnes la moitié de ton argent à Kushida-san, alors prends soin de tes points plutôt que de les gaspiller.

Moi — Tu n’as pas tort.

Si je restais plus longtemps ici, je n’allais faire que la gêner alors je décidai de partir.

9

Il était un peu plus de 17h30 et j’avais rendez-vous avec quelqu’un vers 18h, juste avant le dîner. Alors que je quittais ma chambre pour me rendre sur le pont du cinquième étage, je rencontrai Sudou, qui était dans la chambre deux portes plus loin.

Sudou — Où tu vas ? C’est l’heure de dîner.

Demanda-t-il alors qu’il était sur le point de retourner dans sa chambre.

Moi — Je vais faire une petite promenade avant le dîner.

Sudou — On dirait un vieillard. Vas-y, on se voit au restau.

Nous échangeâmes quelques mots et étions sur le point de nous séparer, lorsqu’il se souvint soudainement de quelque chose. Il éleva la voix et parla.

Sudou — Franchement j’ai été un peu surpris.

Moi — Qu’Ike et Shinohara sortent ensemble ?

Sudou — Quoi, tu le savais déjà ?

Moi — Je l’ai découvert par hasard.

Sudou — Oui c’est sûr ça m’a surpris aussi mais c’est plus pour le fait qu’il veuille rejoindre le groupe d’étude de Suzune.

C’était inattendu, ou plutôt, plus rapide que prévu.

Moi — Un faible niveau scolaire est fatal dans cette école.

Les inquiétudes des élèves dans cet établissement étaient surtout dues à leurs notes car elles pouvaient les faire exclure.

Sudou — Pour moi, c’est un moment précieux car je suis seul avec Suzune mais s’il est vraiment motivé, je n’ai pas d’autre choix que de le soutenir. Il va commencer à bosser dur dès ce trimestre.

Alors il comptait travailler dès la fin des vacances. Tout dépendait de lui mais il pouvait montrer des résultats rapides. Que ce soit Ike ou Sudou, ils avaient réussi à se motiver à travailler par amour.

Moi — Le groupe pourrait encore s’agrandir tu sais.

Sudou — Sérieux ?

Moi — Ça signifie qu’Ike n’est pas le seul élève qui commence à vouloir recevoir des cours de la part de Horikita.

Sudou — Ce serait encore un mec ?

Avec un visage sérieux, il s’approcha de moi et m’attrapa par les épaules.

Moi — Non…….C’est Satô.

Je ne comptais pas lui dire mais je voulais qu’il me lâche.

Sudou — C’est donc une fille… Du coup y’a moyen qu’elle rejoigne si y’a Ike et moi dans le groupe d’étude.

Moi — Elle semble bien déterminée en tout cas.

Sudou — Je ne perdrai pas, peu importe qui vient de toute manière.

Il se mit à renifler, montrant son désir toujours aussi fort d’étudier.

Moi — Ce n’est pas difficile à suivre avec tes activités du club ?

Sudou — C’est difficile mais j’arrive à tenir. La première fois j’ai pioncé même pas une minute après, mais maintenant je peux me concentrer pendant une heure entière.

Étudier pendant une heure était plus que ce suffisant tant que c’était qualitatif. Et il était important d’alterner avec des pauses.

Sudou — Mais je capte pas comment Kanji a eu une meuf avant moi.

Sudou se lamenta tout en riant afin de masquer sa frustration.

Sudou — Avec moi, ça va être un entraînement spartiate comme au basket. C’est la moindre des choses-là.

C’était un mélange de haine et d’amitié qui attendait Ike prochainement.

Moi — Vas-y doucement quand même. Ça va être déjà dur pour lui d’étudier alors il ne faut pas le dégouter.

Sudou — Ouais, t’inquiète. Je suis bien placé pour le savoir.

Il tira la langue comme s’il avait mangé quelque chose d’amer. Après m’être séparé de Sudou, je m’approchai de l’endroit où je voulais aller. Je vis la silhouette de Kushida sur le pont au loin et me cachai. L’heure de rendez-vous était passée de cinq minutes, mais je voulais tout de même confirmer son identité. Je pris mon portable pour l’appeler et elle répondit après deux sonneries. Après confirmation, je sortis de ma cachette. Les portables étaient conçus pour donner la priorité aux appels. Même si le mode d’enregistrement était activé, il se désactivait automatiquement une fois l’appel en cours. Autrement dit, ça devait rester une discussion privée.

Moi — Désolé, Kushida, j’arrive. Tu es toujours là ?

Kushida — Oui, hum… Oh, je suis là !

Kushida vérifia à gauche et à droite et me trouva ensuite, me saluant. Je ne raccrochai pas mais je courus dans sa direction. Une fois face à face, nous raccrochâmes en même temps.

Moi — Désolé de t’avoir fait attendre. Je me suis trompé de chemin.

Kushida — Tu fais donc toi aussi des erreurs, Ayanokôji-kun ? Mais pourquoi tu voulais me voir ?

Moi — Je me suis demandé ce que je devais faire ces dernières heures, mais j’ai pensé que je devais être honnête avec toi.

Kushida — Hmm ? Honnête ? Comment ça ?

Moi — Tu sais, j’ai participé à la chasse au trésor.

Kushida — Oui. Tu étais avec Satô-san, n’est-ce pas ?

J’imagine qu’elle devait se demander pourquoi je lui disais ça.

Moi — J’ai obtenu un gain de 90 000 points. Si je divise par deux, ça fait 45 000 points pour toi. Je pensais que la bonne chose à faire était de t’en donner la moitié.

Je sortis mon téléphone portable et montrai mon relevé. Il indiquait clairement que 100 000 points venaient d’être transférés.

Kushida — Huh ? Ce n’est qu’un jeu, tu n’avais pas à t’inquiéter.

Elle fut surprise et tendit ses deux mains pour refuser.

Moi — Pour être honnête, c’est ce que je pensais au début. En tout cas j’ai essayé de m’en convaincre mais je n’ai pas pu m’empêcher de penser que c’était fourbe de ma part. Il y avait une chance pour que tu les refuses mais je me suis quand même dit que si je me taisais, tu ne le saurais jamais. La honte est la raison de ma présence ici.

Kushida — Mais ────

J’avais beau tenter de la convaincre, elle avait du mal à accepter.

Moi — À vrai dire, prends-les en gage de ma sincérité.

Kushida — Sincérité…… ?

Moi — J’achète ma sécurité en te donnant la moitié des points privés que je gagne et tant que je suis honnête à ce sujet, j’attends de toi la même honnêteté en retour.

Elle fit un « non » du regard.

Moi — Ça ne fait pas de mal d’avoir quelques points privés en plus, non ?

Kushida — C’est vrai, mais ce n’est pas trop lourd pour toi aussi, Ayanokôji-kun ?

Moi — Ça n’a pas d’importance. Je préfère ça que d’avoir des problèmes avec toi.

Kushida — Je ne sais pas… au contraire, c’est un peu effrayant.

Moi — Comment ça ?

Kushida — Ayanokôji-kun, on commence à te couvrir d’éloges maintenant.  Tu as de plus en plus d’alliés. Tu vas vraiment me donner la moitié de tes points juste pour faire une trêve avec moi ?

Moi — En ce qui me concerne, j’en ai conclu que tu étais une menace plus grande que les autres vu que nous sommes dans la même classe. Les élèves comme Sakayanagi ou Ryuuen ne se battent contre nous que dans le cadre de la lutte interclasses.

Quelque peu méfiante, Kushida hocha la tête, comme si elle montrait son approbation.

Kushida — Ok, tu es sûr de vouloir faire ça ?

Moi — Sûr de chez sûr.

Je transférai les points privés sur le compte de Kushida via téléphone.

Moi — Je t’ai donné cette somme mais si jamais j’ai des problèmes d’argent, je te demanderai de l’aide.

Kushida — Hein ? Ça ne se fait pas trop, Ayanokôji-kun.

Kushida rit un peu, comme amusée par ma mesquinerie.

Kushida — Mais je pense que c’est une approche beaucoup plus intelligente que celle de Horikita-san.

Moi — Vraiment ?

Kushida — Je ne veux pas non plus faire de toi un ennemi, Ayanokôji-kun, alors continue de me soutenir.

Avec ça, nous nous séparâmes comme si de rien était.


[1] Mei-Yu Wang de leur classe. On la surnomme Mii-chan

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