Ian Manook – Le chant d’Haïganouch (Michèle)

Ian Manook, Le chant d’Haïganouch, 2023, 380 p

Résumé :

Ce roman retrace une page d’histoire des Arméniens dans les années 40/50.

Le gouvernement français, en accord avec l’Union Soviétique, leur a proposé de prendre un bateau pour Batoumi afin de rejoindre Erevan, en Arménie soviétique.

Agop, sourd aux avertissements de son ami Haïgaz, embarque sur le « Patria » à Marseille, comme de nombreuses familles arméniennes qui souhaitent retrouver leur pays. Les ennuis commencent très vite….

Avis :

Je n’ai pas reconnu l’écriture de l’auteur que j’avais découvert et apprécié en lisant un autre de ses romans suite à l’avis de Julie (Yeruldelgger). J’ai trouvé celui-ci un peu trop imprégné du travail de documentation qu’a dû effectuer l’auteur. En effet, quelque fois, on aurait dit qu’il voulait absolument retracer un fait historique (ou parler d’une date en particulier) et que le récit était « tordu » pour y correspondre.

Bon, les prénoms arméniens ne facilitent pas la lecture (surtout lorsque les personnages en changent !) mais l’épopée d’Agop m’a parue vraiment rocambolesque, bien que j’imagine que des arméniens ont dû subir ces atrocités en Union Soviétique. De plus, l’auteur parle de l’époque d’avant ces années durant lesquelles les arméniens ont été victimes de plusieurs épurations, mais il ne développe pas cette histoire qui me semblait intéressante à connaitre pour comprendre le roman. En fait, ce roman est la suite d’un autre « L’oiseau bleu d’Erzeroum » mais je viens de le découvrir et c’est bien dommage que rien ne le signale.

Bref, moyennement emballée par ce roman qui m’a tout de même permis de connaitre l’histoire terrible de ces « déracinés » et renforcé le sentiment de cruauté hors du commun que l’Union soviétique a fait subir à tout son peuple et à toutes les ethnies qu’elle voulait éliminer.

Ahmet Altan – Les dés (Pascale)

Ahmet Altan, Les dés, 2023, 210 p

Résumé : Ziya est un adolescent de la tribu des tcherkesses. il vit à Istambul en 1900. Il est le plus jeune d’une fratrie de 3 garçons, il voue une grande admiration à son frère ainé, Arif Bey, caïd craint et respecté. Il va apprendre très tôt à être un homme, un homme d’honneur selon les codes de sa famille et de sa tribu. Il abattra d’une balle le tueur de son frère, pour venger l’honneur de sa famille. Il connaitra alors la prison, découvrira le jeu, puis sera exfiltré par sa tribu et caché en Egypte. Il rencontrera Nora, la fille du propriétaire de sa « résidence » et s’attachera à elle.

Avis :

La personnalité de ce jeune homme est très marquée par le sens de l’honneur, les codes de la virilité en 1900 à Istambul chez les voyous. Il est à la fois fier d’inspirer la peur aux hommes qu’il rencontre et tout à fait intimidé devant les femmes. Sa personnalité est troublante, il semble n’éprouver aucun sentiment, capable de tuer de sang froid, mais peut aussi être profondément amoureux, d’un amour platonique.

C’est un roman turc très différent de Neige de Orhan Pamuk, que je viens de lire.

Yasmina Khadra – Les vertueux (Pascale)

Yasmina Khadra, Les vertueux, 2023, 512 p

Résumé :

En 1914 en Algérie, alors française, Yacine est un jeune berger dans une région reculée et très pauvre. Il va partir à la guerre à la place du fils de Gaïd Brahim, le potentat local.

Il connaitra l’horreur de la grande guerre, mais aussi les amitiés indéfectibles liées aux combats, avec les autres soldats. A son retour il cherchera à retrouver sa famille, il vivra alors nombre d’aventures et de retournements de situation.

Avis : Ce roman dépeint l’Algérie des années 1914 à 1938. Le jeune Yacine va traverser cette époque en étant souvent victime d’injustices, puis secouru. Un grand roman d’aventures et très documentaire . Un petit bémol : il lui en arrive vraiment beaucoup à ce pauvre garçon et la fin est un peu « tout est bien qui finit bien » mais pourquoi pas.

Claire Deya – Un monde à refaire (Pascale)

Claire Deya, Un monde à refaire, 2024, 413 p

Résumé :

Avant la fin de la deuxième guerre mondiale, les allemands avaient miné les plages de Provence dans l’éventualité d’un débarquement. En 1945 les français durent s’organiser pour déminer les plages. Ce roman s’inscrit dans la période de travaux de déminage.

Vincent s’engage comme démineur, il est à la recherche d’Ariane, dont il était amoureux avant la guerre. Il rencontre Fabien, ancien résistant, qui dirige les travaux, et les prisonniers allemands contraints à déminer.

Il va s’approcher de ces prisonniers car il pense qu’ils peuvent avoir connu Ariane lors de l’occupation.

Avis :

Le roman fait de nombreux retours en arrière pour raconter différents épisodes de l’occupation. Il montre combien l’espoir de retrouver une personne aimée a aidé les soldats à tenir dans l’enfer qu’ils vivaient dans les camps de prisonniers en Allemagne, comme Vincent, ou dans la Résistance, comme Fabien. Un premier roman très documenté, dont le fil conducteur est la recherche de cette jeune femme. Une histoire très romanesque sur fond de guerre, cà peut paraitre classique, çà l’est, bien sûr. Mais comme Claire Deya est scénariste, elle donne à son roman un côté film de cinéma très convaincant.

J’ai beaucoup aimé.

Louise Erdrich – Le pique-nique des orphelins (Pascale)

Louise Erdrich, Le pique-nique des orphelins, 2015, 500 p

Résumé :

Mary et Karl sont deux enfants de 11 et 14 ans, orphelins après avoir été abandonnés par leur mère en 1932 lors de la grande dépression aux états unis. Ils prennent un train de marchandise pour rejoindre Argus, petite ville du Dakota, pour se réfugier chez leur tante Freezie qui tient une boucherie. Karl fera demi tour, laissant Mary partir seule.

Mary grandira donc avec Sita, la fille de Freezie, fera la connaissance de Célestine, amie de Sita.

Le roman raconte 40 ans de la vie de ces personnages.

Avis :

Le roman est étonnant car les personnages ne sont pas dépeints sous un jour sympathique.

On a plaisir à suivre leurs vies malgré le peu d’empathie qu’ils suscitent. On est plongés dans l’Amérique profonde d’après la crise de 1929. Les chapitres alternent, récits de Sita, de Mary, de Célestine. La narration est impeccable (implacable).

Il y a beaucoup d’amertume dans ces personnages, leurs manières de vivre en couple ( ou non) est tout à fait « décalée ». Je ressors de ce roman un peu interloquée, ne sachant trop quoi penser. Un roman vraiment déroutant à découvrir.

[Prix Roblès 2024] Avril Bénard – A ceux qui ont tout perdu (Dominique)

Avril Bénard, A ceux qui ont tout perdu, 2024, 192 p

Résumé :

L’occident est en guerre et le front se rapproche d’une petite localité qui va être évacuée.

L’armée donne l’ordre de faire un sac et de partir : c’est la douche froide, l’incompréhension.

Comment est ce possible pour Manon et sa fille, Paul, Marek, Mme Dépalle et les autres.

Nous allons suivre ces personnages bousculés dans leur vie pendant l’heure qui précède leur départ.

Avis : Un très court roman mais très prenant et bien accrocheur. Le contexte est ici en pleine actualité et le descriptif de ce départ forcé fait résonance avec les récits de guerre et de déportations qui ont accompagnés mon enfance.

Je trouve, cependant, que le sujet aurait pu être traité plus profondément et j’apparente plus ce livre à une nouvelle qu’à un roman et c’est dommage car il y a évidemment matière à sensibiliser.

[Prix Roblès 2024] Simon Baril – Bleu guitare (Michèle)

Simon Baril, Bleu guitare, 2023, 149 p

Résumé : L’auteur nous fait lire le journal d’un jeune guitariste français vivant à Los Angeles. Il y a neuf ans, il a été victime d’une agression dans une ruelle et ses mains ont été mutilées. Depuis, il ne « vit » plus et se terre dans un studio, ne sortant que la nuit pour marcher au hasard des boulevards de Los Angeles.

Avis :

Premier roman assez court, sous forme de journal intime. J’ai bien apprécié le ton et le style de l’auteur, entre tragique et ironique. Nous sommes dans la tête du musicien puisque nous lisons son journal et le rendu est très intéressant. Un certain suspense nous tient en haleine puisque nous aimerions savoir ce qu’il va lui arriver après ces neuf années de solitude.

L’auteur analyse bien le désir de reconstruire une vie malgré la difficulté qui en résulte. Il lui est peut-être arrivé un accident comme à Sylvain Tesson avec son « sur les chemins noirs » !!!! Les tragédies de la vie semblent inspirer les auteurs.

En prime, nous découvrons un Los Angeles singulier, loin des paillettes et du cinéma.

La fin est un peu brusque mais encore une fois très ironique.

Encore un roman très sympathique.

[Prix Roblès 2024] Gabriel Henry – Blackout ( Pascale)

Gabriel Henry, Blackout, 2023, 204 p

Résumé :

Ulysse est un jeune homme brisé, physiquement, blessé à la tête et au bras. Mais aussi psychiquement, il est devenu amnésique suite à un accident. Il quitte la France pour la Mongolie avec Ariunaa, sa compagne, pour aller vivre dans un village reculé, chez les parents d’Ariunaa.

Chaque jour, dans les gestes du quotidien, il va chercher à retrouver son passé. Ariunna l’y aidera.

D’où viennent ses blessures ? Quel accident l’a conduit ici ?

Avis :

Le mystère plane et demeure jusqu’à la fin du roman, très bien construit. On suit le cheminement d’Ulysse, ses interrogations, ses contemplations de la nature très sauvage. Il observe la vie simple des villageois autour de lui, concentrée sur l’organisation matérielle : sortir les vaches de l’enclos, surveiller leurs déplacements, aller dans la ville voisine pour le marché…

Les descriptions de la nature sont somptueuses, l’écriture est très poétique, très attachante.

J’ai pensé à Continuer, de Laurent Mauvignier pour les grandes descriptions des steppes mongoles, et le côté « réparateur » de la nature pour les humains « cabossés » de la vie.

[Prix Roblès 2024] Cécile Tlili – Un simple dîner ( Michèle)

Cécile Tlili, Un simple dîner, 2023, 179 p

Résumé : Etienne, un jeune avocat très ambitieux invite un couple d’ami à diner chez lui. Il a une idée derrière la tête. Sa compagne, Claudia, s’échine à préparer un diner digne de ce nom. C’est une femme très timide et mal dans sa peau qui est terrorisée à l’idée de recevoir du monde chez elle. Johar et Rémi arrivent et le huis clos de la soirée peut s’installer.

Avis :

Roman assez court mais avec un ton très juste. Les tourments et les doutes de chacun sont exprimés avec clarté et sensibilité. Cela m’a fait penser au film « cuisine et dépendance » que j’avais beaucoup aimé, l’humour en moins.

L’écriture de l’auteur est simple et fluide et le ton restitue à la perfection les angoisses des uns, la nervosité des autres puis finalement les décisions qui en découlent.

Roman très sympathique.

Sarai Walker – Les voleurs d’innocence (Pascale)

Sarai Walker, Les voleurs d’innocence, 2023, 624 p

Résumé :

Voici l’histoire d’une famille de 6 filles Aster, Rosalind, Calla, Daphné , Iris, et Hazel, dans les années 50 à Bellflower près de New York.

Leur père Henry Chapel est un richissime marchand d’armes. Leur mère, Belinda, mariée sans amour, est de constitution fragile. Elle a un sixième sens, pressent les évènements tragiques. On la croit folle. Lorsque la fille ainée Aster est sur le point de se marier, Belinda prédit un malheur, mais ne pourra empêcher ce mariage. Aster mourra mystérieusement dès le lendemain de la noce.

La deuxième des filles, Rosalind connaitra elle aussi un sort funeste, comme si une malédiction frappait la famille.

Avis :

L’histoire est racontée par Iris, la cinquième fille. On ne sait comment elle a échappé à la malédiction ni ce qu’elle a dù sacrifier pour survivre. Ce roman est étonnant car il nous tient en haleine jusqu’à la toute fin, bien que l’histoire soit connue depuis le début. Je n’ai pas bien compris ce que l’auteur cherchait à démontrer, mais j’ai marché jusqu’à la fin.

Un roman sur la sororité, un roman féministe ?