La politique allemande plie le genou devant la Turquie

Pendant que les sondages indiquent qu’une majorité des Allemands souhaite mettre un terme aux négociations quant à l’adhésion de la Turquie à l’Union Européenne, la politique voit ça autrement.

Elmar Brok (CDU/EPP) veut continuer à négocier avec la Turquie d'Erdogan. Toute comme Rebecca Harms. Foto: European People's Party / Wikimedia Commons / CC-BY 2.0

(KL) – Le secrétaire général du Conseil de l’Europe Thorbjorn Jagland avait ouvert la voie en exprimant son approbation pour les « purges » actuellement en cours et d’autres responsables politiques suivent sur cette voie. Pendant que ces « purges » concernent maintenant même les fédérations sportives (de nombreux arbitres de football ont été virés de leur fédération et risquent l’arrestation), la politique européenne a décidé de fermer les deux yeux pour ne surtout pas mettre en péril l’accord avec la Turquie concernant les réfugiés.

Pour une fois, les eurodéputés de la droite allemande et des Verts allemands sont d’accord – stopper les négociations avec la Turquie serait un „non-sens diplomatique“ et „irresponsable“, ont déclaré dans une harmonie rare Elmar Brok (CDU) et Rebecca Harms (Verts) – même si la plupart des Allemands ne veut plus du tout de la Turquie dans l’UE. « Ce serait irresponsable d’arrêter les relations avec la Turquie dans cette situation sans savoir où nous voulons aller », a déclaré Rebecca Harms et on se demande pourquoi.

Même son de cloche chez Elmar Brok qui estime qu’un arrêt immédiat des négociations représenterait un « non-sens diplomatique » – « la raison et les intérêts des deux côtés nous obligent à un désarmement rhétorique ». Vraiment ? Peut-être en trouvant une nouvelle terminologie pour ce que le régime d’Erdogan est en train d’infliger à son pays ?

Pour faciliter le travail des Jagland, Brock et Harms, on pourrait, par exemple, commencer à remplacer le terme « purge » par « mesure de stabilisation », « arrestations de masse » par « sécurisation de la démocratie », « peine de mort » par « juste punition » – cela permettra de poursuivre les négociations, le commerce, le maintien des bases de l’OTAN en Turquie et ce terrible « troc » de réfugiés « illégaux » et réfugiés « légaux » entre l’UE et la Turquie.

Seul le président de la « Die Linke », Bernd Riexinger, s’est prononcé en faveur d’un arrêt des négociations d’adhésion avec la Turquie, en trouvant des mots clairs. « Un gouvernement qui poursuit des journalistes, qui met la justice sous contrôle, qui emprisonne ses opposants et qui mène une guerre contre sa propre population, ne peut pas être admis dans l’Union Européenne », a-t-il dit.

Mais à quoi sert la diplomatie si elle reste muette et inefficace à un moment où un pays comme la Turquie vire vers un autoritarisme anachronique ? La Turquie est en train de violer les Droits de l’Homme et presque l’ensemble des « valeurs » dont on pensait toujours qu’elles sont chères à l’Europe. Il est tout à fait surprenant que la « realpolitik » européenne va jusqu’à une sorte de soutien à un président-dictateur – peu étonnant que les citoyens et citoyennes se détournent de plus en plus d’un monde politique marqué par un égoïsme qui frôle déjà le cynisme. Les chiffres en disent long – les sondages actuels montrent que 66% des Allemands seraient pour un arrêt immédiat des négociations avec la Turquie, 69% estiment qu’il serait plus judicieux de stopper aussi les paiements de milliards d’euros à la Turquie – cet argent serait mieux utilisé en Grèce pour y soutenir l’accueil des réfugiés. Et – 52% des Allemands seraient favorables à ce que l’accord entre l’UE et la Turquie concernant les réfugiés soit invalidé. A bon entendeur.

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