. Temps fort, le passage du canal de Suez

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Port Saïd – Entrée du Canal de Suez (1943)

La poésie est probablement un bon remède pour apaiser l’imaginaire des hommes confrontés aux atrocités guerrières. En découpant cet autre article, rédigé par le médecin de marine du bord, le Docteur Perruchio, qui probablement a du faire face, durant ces périodes troublées, à de nombreux cas douloureux, je retrouve, collé entre deux pages de son cahier, les descriptions que me faisait mon père lorsqu’il évoquait son passage du canal de Suez le 30 mars 1944.

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Texte du Dr Perruchio -Le Canal de Suez

Le canal de Suez

Le Richelieu est en route vers Port Saïd. Ce port marque le début du Canal de Suez qui relie la Méditerranée à la Mer Rouge.
Il y a environ 3200 ans un pharaon égyptien Seti Ier fit creuser un canal réunissant la Méditerranée à la Mer Rouge. Il fallut 8 siècles pour le terminer. Par ce canal passaient les marchandises précieuses venues de l’Inde et de l’Arabie vers le Royaume d’Egypte, alors le plus puissant du monde. Avec les guerres, les changements de dynasties et les invasions, ce canal, tantôt ensablé et tantôt déblayé vécut jusqu’à l’an 712 où le Calife Al Mansur le fit boucher pour priver la Mecque  révoltée contre lui, de son ravitaillement en blé.
Après que Vasco de Gama eut doublé le Cap de Bonne Espérance, le commerce avec les Indes se fit presque en totalité par cette route maritime très longue ou par la route terrestre des caravanes d’Arabie, soumises par les arabes à des droits élevés et des pillages fréquents.
Ainsi, pour raccourcir cette prestigieuse route des Indes, route au bout de laquelle se trouvait la richesse et tout un monde étrange et fascinant, l’idée d’unir à nouveau la Méditerranée et la Mer Rouge par un canal en faisant de l’Afrique une ile, hantait depuis des siècles le cerveau des hommes d’actions.
Le réalisateur du canal est un français : Ferdinand de Lesseps.
Il eut le premier idée du canal en 1832, lorsque arrivant en Egypte comme élève-consul  il eut l’occasion de lire des ouvrages sur les divers projets déjà faits dans le passé. Dès lors, il consacra sa vie à cette œuvre. En 1884 Mohammed Saïd, ami personnel de Lesseps monte sur le trône d’Egypte et lui accorde la concession nécessaire. Lesseps lance un emprunt de 200 puis de 400 millions et se met à l’œuvre. Il fait creuser un canal dans un sable mouvant et sans eau douce, sans machines, par de la main d’œuvre indigène et face à de redoutables adversaires, les arabes, la Turquie, les financiers, et pendant quelques temps l’Angleterre. Les arabes et la Turquie voulaient interdire aux européens l’accès facile aux pays sacrés où avait vécu leur prophète, les financiers enrageaient de voir le public souscrire sans passer par eux les emprunts de Lesseps et l’Angleterre, enfin, croyait alors que la construction de ce canal était une menace dirigée contre les Indes.
Epuisé par la suite, Mohammed Saïd mourut et fut remplacé par Ismaïl Pacha, son fils. Celui-ci soutint de Lesseps mais avec moins de vigueur que son père. Lesseps pour défendre son œuvre déploya une énergie farouche, allant faire démarches sur démarches au près du Sultan de Constantinople, de Napoléon III et du premier Ministre Anglais.
Enfin, après des difficultés sans nombre, le 17 novembre 1769 le canal de SUEZ est inauguré en présence de presque toutes les têtes couronnées d’Europe. L’Angleterre fait amende honorable. De Lesseps est décoré par la reine Victoria et fait citoyen de Londres. Par la suite l’Angleterre acheta la plus grande part des actions de la compagnie, ce qui lui permet de contrôler efficacement la nouvelle route des Indes.
Le canal commence en Méditerranée à Port Saïd et s’ouvre dans la Mer Rouge à Suez. C’est un canal sans écluses, long d’environ 100 miles. Il traverse des zones où la mer à conquis sa place : marais salants à Port Saïd, lacs amers à Menzaleh.
Mais c’est au prix d’efforts constants qu’il subsiste car le vent de sable, le Khamsin, aurait rapidement poussé dans sa mince tranchée les sables du désert et le Nil ne se ferait qu’un jeu de combler de ses alluvions les bassins de Port Saïd si l’homme ne travaillait sans cesse contre la nature pour assurer la vie de l’œuvre qu’a rêvé, conçu et réalisé un grand français Ferdinand de Lesseps, dont la statue s’élève à Port Saïd pour perpétuer aux yeux des passagers, des équipages des navires, le souvenir de celui à qui une si grande œuvre est due.

Dr Perruchio

A propos Paul Kersaudy

Pratique la photographie en amateur, le théâtre et aime jouer avec les mots ...
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